Kritik23. September 2024

Au cinéma: «Emmanuelle», l’icône de la libération sexuelle revient 50 ans plus tard

Au cinéma: «Emmanuelle», l’icône de la libération sexuelle revient 50 ans plus tard
© 2024 Elite Film

Mis en scène par Audrey Diwan, le nouveau film «Emmanuelle» revisite le célèbre mythe, avec dans le rôle principal, une Noémie Merlant en quête d’un plaisir perdu. On fait le point.

(Une critique de Marine Guillain)

Emmanuelle (Noémie Merlant) s’envole pour Hong Kong - ville dont l’on ne verra rien, puisque le récit aux airs de huis clos se déroule presque totalement intra-muros. La jeune femme travaille au contrôle qualité du groupe qui possède le Rosefield Palace, et doit s’assurer que l'expérience des clients soit optimale. Errant entre les coulisses du palace, l’arrière-décor, et le devant de la scène, Emmanuelle s’amuse à quelques jeux de séduction et s'adonne à quelques plaisirs charnels, bien qu’elle ne semble pas en tirer grande satisfaction. Ancrée dans une solitude profonde, elle échange avec la patronne de l’établissement (Naomi Watts), une jeune escort ou encore un client, pour qui elle développe une certaine obsession.

Adapté du personnage du livre d'Emmanuelle Arsan, ce nouveau long métrage sort pile 50 ans après celui qui avait fait scandale en 1974. Réalisé par Just Jaeckin et portée par Sylvia Kristel, ce film aussi décrié que culte fut un triomphe, restant onze ans à l’affiche des cinémas. Outre la première et la dernière scène, la nouvelle version d’«Emmanuelle» se détache totalement des œuvres existantes. Érotique? À peine. Sulfureux? Absolument pas. Pour Audrey Diwan (qui a remporté le Lion d’or de la Mostra de Venise en 2021 pour «L’Événement» et a coscénarisé «L’amour et les forêts», «Pas de vagues» ou encore «L’amour ouf»), l’envie était d’apporter une réflexion psychologique autour du désir féminin.

Au cinéma: «Emmanuelle», l’icône de la libération sexuelle revient 50 ans plus tard
Chacha Huang et Noémie Merlant dans «Emmanuelle» © 2024 Elite Film

«À notre époque, il me semble que la jouissance est totalement liée à l’impératif de performance, au sens capitaliste du terme», a-t-elle expliqué. «Il faut rentabiliser, optimiser, profiter. Dans une société dévorée par les images de pornographie violente, qui ont la volonté de tout dire et de tout montrer, je me suis demandé si un film érotique pouvait exister et en quoi il serait intéressant.» Aussi prometteur soit ce postulat, sa mise en forme tombe malheureusement à plat.

Oui à la dimension féminine et féministe et oui à la femme sujet au lieu d’objet, maîtresse d’elle-même, de ses choix et de ses désirs. Visiblement lassée des normes et de la monotonie, l’héroïne mélancolique cherche vaguement un chemin vers le plaisir, les sensations, l’intensité. Le problème, c’est que son ennui est contagieux! Le récit est dépeint avec une telle froideur que l’on reste complètement en dehors de la problématique.

Comme Emmanuelle, impossible de ressentir le moindre frisson face à ce film impersonnel, sans odeurs, sans saveurs. La musique agaçante et les plans qui s’attardant sur la surface, sur le paraître des gens et des lieux, laissent de marbre. Comment un film réunissant le triple talent et la triple intelligence d’Audrey Diwan, Rebecca Zlotowski (au scénario) et Noémie Merlant puisse être autant dénué d’âme? Le mystère reste entier.

2/5★

Plus d'informations sur «Emmanuelle»

Bande-annonce d'«Emmanuelle»

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