L’Allemagne a eu «Dark», l’Espagne a eu «La Casa de Papel». Mais en France, Netflix n’a pas encore réussi à s’enraciner avec une série populaire ou créatrice. C’est l’ambition affichée par «La Révolution», à l’évidence conçue dans l’idée d’en faire un rouleau compresseur télévisuel à en juger par les moyens déployés à l’écran. Netflix tient-il enfin son joyau français?
En 1787, en France, la colère gronde tandis que les nobles s’engraissent alors que le peuple s’enfonce dans la misère... mais pire encore, une maladie appelée le sang bleu se répand dans l’aristocratie et pousse celui qui est infecté à s’en prendre aux miséreux. En la découvrant, Joseph Guillotin (futur inventeur de la guillotine) va sans le savoir provoquer le début d’une révolte.
Que les historiens et les aficionados de naturalisme quittent immédiatement la salle, «La Révolution» n’a pas pour but de raconter le passé mais plutôt de jouer avec pour mieux raconter le présent. La scène d’introduction du tout premier épisode annonce à ce titre très clairement la couleur: pas de reconstitution, mais bien un divertissement pulp, sombre et particulièrement sanglant, voire gore, évoquant immédiatement un certain «Pacte des Loups» autant par son envie de spectacle décomplexée que par sa tendance esthétisante. De quoi se réjouir dans le paysage audiovisuel français éternellement trop poli et abordant trop souvent le genre et le divertissement en se pinçant le nez. Mais les réjouissances seront de très courte durée.
«La Révolution» n’a pas pour but de raconter le passé...
Cette même scène d’introduction annonce également très clairement le sentiment qui dominera le spectateur pendant tout le visionnage de la saison: il ne faut pas plus de deux minutes à la série pour provoquer un ennui léthargique ponctué de quelques sursauts d’effroi devant le mauvais goût cosmétique de l’œuvre et de quelques roulements d’yeux à s’en faire une entorse du cristallin, tant le récit est à dormir debout. «La Révolution» est ainsi une gigantesque confusion, non seulement dans l’histoire absurde qu’elle entend raconter, mais également dans les symboles qu’elle entend faire passer, aux choix vides ou particulièrement simplistes. Que «La Révolution» assume de s’assoir sur l’Histoire n’est en aucun cas un problème en soi, mais cela le devient dès lors qu’elle fait le choix de la remplacer par une colonne armée d’invraisemblances absurdes véhiculant des clichés antédiluviens, entretenant au passage de nombreuses confusions historiques et politiques, n’était clairement pas la solution.
Alors, peut-être fallait-il ne pas prendre cette série autant au sérieux qu’elle ne le fait elle-même, et se contenter simplement de l’aspect récréatif grand-guignol, mais même cette tâche est parfois rendue difficile tant la mise en scène bat des records de laideur pompière. Que les décors soient variés et impressionnants, et les costumes soignés est un fait indéniable, mais «La Révolution» se vautre tellement dans le bling-bling et les effets de styles gratuits qu’elle a plus le cachet d’une pub pour voiture que d’une simili histoire d’horreur baroque classieuse. Heureusement, quelques exécutions morbides égayent parfois le spectacle ronflant, et les trognes alignées dans les seconds rôles viennent donner un semblant de gueule (littéralement) à l’ensemble, parvenant un peu à faire oublier l’interprétation dissonante des premiers rôles. À peine suffisant cependant pour se motiver à lancer l’épisode suivant d’une série globalement assommante et kitsch.
2/5 ★
Disponible dès aujourd'hui sur Netflix.
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