Review9. Oktober 2023

Critique de «L'Exorciste - Dévotion», exhumation cathartique

Critique de «L'Exorciste - Dévotion», exhumation cathartique
© Universal Pictures International Switzerland

Suite du film culte réalisé par feu William Friedkin en 1973, «L'Exorciste - Dévotion» de David Gordon Green était attendu au tournant. Serait-ce le sequel de trop? Il y a débat. Décryptage!

Après avoir tenté d’invoquer les esprits, Angela (Lidya Jewett), 13 ans, et sa camarade de classe Katherine (Olivia O'Neill), disparaissent et refont surface trois jours plus tard dans d’étranges conditions. Bientôt, un mal les ronge de l’intérieur et les deux adolescentes montrent les premiers signes de possessions démoniaques. Ainsi, le père d’Angela (Leslie Odom Jr.) tente de retrouver Chris MacNeil (Ellen Burstyn) dont la fille, Regan, a souffert des mêmes troubles en 1973.

Ils ont été nombreux à s'y casser les dents. Au gré des préquels et autres reboots en pagaille, «L'Exorciste» a voyagé à travers le temps, les années l’écorchant chaque fois un peu plus. Enclume dans la carrière de John Boorman, la version de 1977 est tellement navrante que même William Peter Blatty, auteur du roman qui inspira William Friedkin, décide en 1990 de réaliser sa propre suite pour le cinéma : «L'Exorciste, la suite». Bref, lesté de titres aussi appétissants qu’une déclaration d'impôt, la machine à reboot s’enraye et «L'Exorciste» se délite jusqu’à la moelle.

Michael Myers souffrait d’ailleurs de la même toux avant que David Gordon Green ne lui administre une tisane pour se requinquer. Frêle et pimpant, en 2018 le tueur au masque de William Shatner reprend la rando, et une (solide) trilogie plus tard, le réalisateur prodige est devenu le nécromancien le plus célèbre et le plus décrié d’Hollywood, relançant, au passage, la carrière de l’icône Jamie Lee Curtis. Alors quid d’une exhumation inéluctable?

Critique de «L'Exorciste - Dévotion», éxhumation cathartique
Ellen Burstyn et Leslie Odom Jr. © Universal Pictures International Switzerland

Répondant aux principes immuables d’une franchise, David Gordon Green (accompagné de son ancien camarade d’université Danny McBride, aussi coscénariste de la trilogie «Halloween») nous offre une histoire qui se détache de la guirlande de navets qui la précède. Ouverture à Port-Au-Prince, Leslie Odom Jr. et sa compagne s’apprêtent à devenir parents avant qu’un séisme ne vienne contrecarrer leurs plans. Parmi les ruines du tremblement de terre, celui qui irradiait Haïti en 2010, se terre le visage d’une peine inconsolable et la promesse d’une poésie frontale et propre à l’horreur.

Si des films comme «La Nuit des morts-vivants», «Get Out» ou «Candyman», utilisent le registre horrifique pour parler de racisme ou encore de gentrification, c’est bien de deuil dont il sera question ici. Comme une envie de parler aux absents ; Lidya Jewett incarne alors cette jeune adolescente dont la quête de paix intérieure l’emmènera dans ce tunnel au fond des bois. Diabolique et singulièrement touchant, son tandem avec Olivia O'Neill (dont la ressemblance avec Linda Blair en 1973 ancre le récit), est autant une atrocité pour les parents qu’une épreuve de force pour le public.

Grossiste de l’horreur, il y a dans les tiroirs de la maison Blumhouse, des productions, c’est vrai, de qualité tout à fait variable. Une chose est sûre, «L'Exorciste - Dévotion» ne manquera pas d’échauffer les cerveaux. Faudra-t-il tacler son manichéisme, (sans doute), ses références un peu poussives au matériel original (elles existent, en effet) et sa morale un peu revêche sur la religion (dévot un jour, dévot toujours? L'ADN de «L'Exorciste» contient de toute façon le sel de sa propre critique.

Critique de «L'Exorciste - Dévotion», éxhumation cathartique
David Gordon Green © Universal Pictures International Switzerland

Alors, symptomatique d’un genre qui peine à se réinventer, il n’en reste pas moins un divertissement tout à fait honorable et une élégante modernisation d’un chef-d'œuvre qui était resté dans son jus. L’Église et ses fidèles en prendront pour leur grade, et révérence sera faite à la diversité culturelle et au pouvoir des communautés. Au seuil du kitsch et de l’éructation visuelle misérable, l’horreur est cathartique et «L'Exorciste - Dévotion» trouve son cap, cartoonesque même, quand Olivia O'Neill s’éreinte la voix face à une foule ébahie dans la nef de l’église : «the body and the blood !».

Voilà qui nous laisse songeurs et (oserons-nous l’avouer) impatients (oups) de cette nouvelle trilogie à venir. Le prochain volet («The Exorcist: Deceiver») devrait sortir en 2025. Les rendez-vous sont pris. «L'Exorciste - Dévotion» sera aussi l’occasion de répondre à l’insondable question de Jamie Kennedy dans «Scream II» : oui, il y a des suites tiennent la route!

3,5/5 ★

Au cinéma le 11 octobre.

Plus d'informations sur «L'Exorciste - Dévotion».

Bande-annonce de «L'Exorciste - Dévotion»

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