Review14. April 2023 Theo Metais
Critique de «Des gens bien» sur Arte, série noire qui sent le sapin sur fond d’arnaque à l’assurance
Dans une bourgade reculée de Belgique, un corps est retrouvé calciné et les bonnes mœurs s’enflamment. Voici notre critique de «Des gens bien», mini-série déjantée à découvrir sur Arte.
À Juvin dans les Ardennes, l’inspecteur Tom Leroy (Lucas Meister) forme un couple respecté de la paroisse avec sa compagne Linda (Bérangère McNeese), propriétaire d’un centre de bronzage à la frontière. Mais en ce triste soir, la voiture de l’inspecteur tombe dans un ravin. Un tragique accident dont Tom réchappe miraculeusement, dit-on, alors que son épouse est restée coincée à l’intérieur. L’inspecteur en chef (Dominique Pinon) connaît bien le bonhomme, ce sont «des gens bien», alors aucune autopsie ne sera demandée sur le corps de la défunte. Une histoire qui se mélange à des affaires en cours et au parcours d’un policier (Michaël Abiteboul) qui commence à douter de la version officielle. N’en déplaise à son chef, et à sa partenaire (India Hair), il mène l’enquête en solitaire…
Bientôt se détricote une sombre affaire d’arnaque. En effet, Linda et son époux croulent sous les dettes. La corde au coup, la banque leur réclame 260 000 euros, et une procédure de recouvrement menace son local. Il y eut d’abord un prêt souscrit il y a 8 ans pour lancer son entreprise, ensuite un autre pour la maison, pour la voiture, et puis encore pour maintenir le business à flot. Les créances se sont envolées aussi vite que les promesses d’un avenir meilleur et la délivrance pourrait bien venir d’une clause sur un contrat d’assurance vie.
Ainsi, les frères Coen se mettent au vert dans les Ardennes. Le visionnage de la série «Des gens bien» sur Arte nous renvoie en effet à «Fargo», «Bienvenue à Suburbicon», ou à l’éternel «Assurance sur la mort» de Billy Wilder. Créée par Stéphane Bergmans, Benjamin d'Aoust et Matthieu Donck, trio derrière la série «La Trève» sur Netflix, «Des gens bien» est une plongée tragicomique au cœur de ces vies esseulées de Belgique. Lucas Meister et Bérangère McNeese interprètent un tandem à la fois marginal, allumé et touchant. Pantins impuissants d’un système qui se nourrit de la moelle de ses fidèles, leur rédemption sera immorale, tendre, burlesque et absurde.
Cette petite bourgade des Ardennes belges devient le théâtre d’un drame à la portée contemporaine et universelle. Le tragique de nos sociétés capitalistes se mêle à une critique du catholicisme, aux films noirs hollywoodien et au phrasé fleuri de la Belgique et ses effluves de flamands. L’occasion, aussi, d’un voyage hors du temps dans le cadre majestueux des Ardennes et son parfum forestier de «Twin Peaks». Si l’écriture de la série est pleine de stéréotypes et de second-degré, c’est pour mieux asseoir le socle de sa caricature. «Des gens bien» ne manquera d’ailleurs pas de déclencher un rire sensible et empathique pour ses quotidiens reculés et les choix de ses personnages, qu’ils soient religieux, professionnels, existentiels.
Coproduit par la RTBF et Arte, «Des gens bien» permettra aussi de recroiser les formidables, et trop rares, Dominique Pinon, Jean-Francois Gallotte, India Hair ou encore Peter Van Den Begin et François Damien. Malgré quelques longueurs, c'est vrai, les 6 épisodes de cette mini-série offriront un sous-texte déluré et une promenade bigrement cinéphile pour conter, avec humour et ambivalence, la vie des gens bien.
4/5 ★
Sur Arte les jeudis 13 et 20 avril à 20h55. La saison 1 est déjà disponible en intégralité sur Arte.tv.
Bande-annonce de «Des gens bien»
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