Critique4. Dezember 2023 Cineman Redaktion
Critique de «Le Consentement», à l’ombre des pages, la perversité
Adaptation du livre éponyme de Vanessa Springora sorti en 2020, le film raconte la spirale glaçante de l’emprise grandissante entre un écrivain à l’aura charismatique et une adolescente de 36 ans sa cadette.
(Une critique de Laurine Chiarini)
Vanessa, presque 14 ans, rencontre un soir Gabriel Matzneff, écrivain à succès, lors d’un dîner auquel elle assiste avec sa mère. D’un côté, une adolescente gracile éprise de littérature ; de l’autre, un prédateur sexuel, pédophile notoire qui puise son inspiration et nourrit ses récits dans des rencontres hors-la-loi minutieusement relatées, pour le plus grand bonheur de ses lecteurs et du monde littéraire. Cette histoire est vraie. Elle se passe près de chez nous, à une époque qui semble être hier. Même fictionnalisée pour le grand écran, elle conserve une force de frappe et de révolte intacte.
Souvent accusé d’offrir une plateforme de choix aux pédophiles, c’est le réseau social TikTok, prisé de la génération adolescente, qui a paradoxalement permis un renversement spectaculaire de la situation du film au box office. Mentionné plus de 30 millions de fois à la mi-novembre, le hashtag du titre était utilisé par de jeunes spectateurs se filmant avant, puis après la projection, faisant bondir les ventes de tickets de 72% dans sa 3e semaine d’exploitation. À l’aune de ce phénomène, la sortie du film, d’abord annulée en Suisse romande, a finalement été réagendée au 6 décembre.
L’époque dépeinte, les années 80, voit se succéder une galerie de personnages où personne ne semble être à sa place. Entre un père absent et une mère qui tolère la relation de sa fille, à défaut de couper complètement les ponts, pas un adulte dans l’entourage de Vanessa ne semble faire preuve de bon sens. Le public, les médias et, au final, la société entière est complice de figures comme Matzneff. Pire encore : devant le succès de ses livres, elle ne fait qu’encourager son comportement, alors que Vanessa, en détresse, est expulsée de son lycée pour avoir manqué trop de cours.
À 23 ans, Kim Higelin campe sans peine une adolescente presque 10 ans plus jeune face à un Jean-Paul Rouve à des années-lumières de son personnage de Jeff Tuche. Baignée d’une lumière froide, la caméra serre de près le visage juvénile de l’adolescente, contraste saisissant avec les mains ridées à chevalière de son agresseur. 3 ans après la sortie du livre, le récit de Vanessa Springora est adapté à l’écran et à la scène, preuve s’il en est qu’amplifier la parole reste une opération d’actualité complètement nécessaire.
3,5/5 ★
À découvrir le 6 décembre au cinéma.
Plus d'informations sur «Le Consentement».
Bande-annonce de «Le Consentement»
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