Critique5. Februar 2024 Theo Metais
Critique de «Feud» sur Canal+, amour, gloire et Ryan Murphy
Ryan Murphy reprend la main sur sa série d’anthologie pour nous parler du scandale qui opposait Truman Capote aux «cygnes» de la haute société new-yorkaise.
Arnaques, crimes et Tiffany, la verve est endiablée et le port altier. Nul doute, nous voilà au pays truculent de Ryan Murphy. Showrunner prolifique (un peu trop parfois), nous découvrons en 2017 la rivalité entre Bette Davis (Susan Sarandon) et Joan Crawford (Jessica Lange) sur le tournage du classique «Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?» dans le premier volet de la série «Feud» (disponible sur Disney+). Fort du succès de sa première saison, voilà que se dévoile aujourd’hui le deuxième chapitre.
Inspirée d’une histoire vraie, et devant la caméra du réalisateur Gus Van Sant (rien que ça), cette fiction nous emporte entre 1968 et 1984. Tom Hollander («The White Lotus») interprète le célèbre auteur des chefs-d'œuvre «Les Domaines hantés» (1948), «De sang-froid» (1965) et «Petit Déjeuner chez Tiffany» (1958). Adulé par les un.e.s, redouté par les autres, ses succès littéraires lui ont permis d’accéder au Mont Olympe de la bourgeoisie new-yorkaise. Dès lors, Truman Capote trône au sommet de sa gloire, un verre à la main, et se pavane dans la salle du prestigieux restaurant «La Côte Basque» avec celles qu’il prénomme ses «cygnes».
Naomi Watts (Babe Paley), Chloë Sevigny (C.Z. Guest), Calista Flockhart (Lee Bouvier), Molly Ringwald (Joanne Carson) et Demi Moore (Ann Woodward) incarnent ce précieux parterre de femmes d’influences, journalistes, top model et autres jet-setteuses réputées. Fin chroniqueur de son temps, tout est un prétexte à la littérature et elle n’est d’ailleurs que fiction selon les dires de l’écrivain prodige. Or, en 1975, quand le magazine Esquire publie les premiers chapitres de son nouveau roman, les «cygnes» sont outrés de la précision avec laquelle Truman s’est délibérément inspiré de leurs drames, aussi sordides soient-ils.
Des pages aux desseins tragiques, notamment pour Ann Woodward que Capote accuse ouvertement du meurtre de son mari, ou pour Babe Paley, sa plus fidèle confidente, dont l’étalage de la vie privée se pose quelque part entre le reportage d’investigation et le torchon. En découle une rivalité devant l’éternel, Truman Capote vient de creuser sa tombe sociale. Dans le bas-monde des Dieux, «Feud : Les trahisons de Truman Capote» permet quelques réflexions sensées sur les enjeux de la littérature et celles et ceux qui les incarnent. Si les rôles sont impeccablement interprétés, pas sûr que la série ne laisse un souvenir impérissable. Ni bouleversant, ni particulièrement novateur, après «Halston», «Hollywood», «The Watcher» ou «American Horror Stories», Ryan Murphy poursuit néanmoins sa démystification des icônes et de l’idéal américain avec, toujours, un clin d’œil à la communauté queer des années qu’il dépeint.
3/5 ★
Disponible depuis le 1er février, en exclusivité sur Canal+ via MyCanal.
Bande-annonce de «Feud : Les trahisons de Truman Capote»
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