Critique20. September 2019 Theo Metais
Netflix: «Dans le cerveau de Bill Gates» - Et si la tech pouvait sauver le monde?
Mini-série Netflix en 3 volets consacrée au visionnaire et fondateur de la société Microsoft, «Dans le cerveau de Bill Gates» est une enclave dans la vie de l’ex-PDG. Aujourd’hui reconverti en philanthrope, le réalisateur primé aux Oscars Davis Guggenheim («Une vérité qui dérange»), revient sur les combats de sa fondation «Bill & Melinda Gates Foundation», dans laquelle il opère conjointement avec son épouse et partenaire.
Une mini-série, une intrusion intime, dans la vie et le cerveau de Gates. Décoder le codeur, voilà le projet, risible selon Melinda Gates, de cette série en trois volets. Un cerveau chaotique selon elle, Davis Guggenheim n’en reste pas moins un admirateur. «Dans le cerveau de Bill Gates» permet de mettre en lumière la vie d’un homme en tout point fidèle à une certaine iconographie du rêve américain. Sorte de self-made rockstar interplanétaire de l'informatique, un jour encensé, l’autre lynché sur l’agora publique. Pour nous conter cette histoire, la série suit une narration bougrement classique, entrecroisée de témoignages de ses proches, amis et collaborateurs. Jusque dans son remplissage sonore d’un genre Tangerine Dream sous anesthésie générale, la vie de Gates se déploie à loisir durant près de 3 heures, sans artifice aucun, avec une simplicité bienvenue, à son image en somme.
De ses premiers exploits en mathématique, en passant par sa rencontre avec Paul Allen à Lakeside et leur décryptage du code de l’ordinateur PDP10, à leur ascension fulgurante dans la micro-informatique (au centre d’un deuxième épisode plus sentimental), la vie du presque teenage milliardaire est passée en revue avec une délicatesse amicale, pour finalement se consacrer à sa fondation et ses projets, laquelle s’offre ici un billboard gigantesque. Derrière leurs airs de couple idéal, les Gates combattent le taux de mortalité causé par la diarrhée, éradiquent la polio au Niger, supplantent l’énergie fossile. Bref, on rigole mais chez les Gates ça bosse dur, contre vents et marées, contre le terrorisme de Boko Haram qui fit capoter les campagnes de vaccinations, contre le temps qu'il nous reste face à l’urgence climatique, contre l’opinion publique, contre la politique.
«Dans le cerveau de Bill Gates» nous rappelle ô combien le futur de notre planète est empêtré dans les maillages de la politique internationale.
Admirable de dévotion, avec sa cannette de Coca-Cola et son Deluxe Fine à la main, entre deux parties de bridge ou lorsqu’il parle du chercheur Vaclav Smil, l’entrepreneur et philanthrope interdisciplinaire est de ces figures toujours plus drôles et fascinantes que les documentaires qui leur sont consacrés. Pendant deux ans, le réalisateur s’est approché d’un homme qui a résolument modifié la vie de ses contemporains. Au plus près du mythe, Gates nous dévoile certaines de ses méthodes de travail, ses inspirations, ses livres de voyage (1er épisode) et même une imitation de Robert De Niro dans «Taxi Driver», ça vaut le détour!
Véritables coléoptères inarrêtables de la philanthropie, lui, sa femme et d’autres, sont des acharnés de l’innovation. «On a toujours su qu’il y aurait du politique. On n’imaginait pas que ça viendrait de notre gouvernement.» entendra-t-on d’un associé de Bill Gates, alors qu’il lui annonce les résultats des négociations sur l’accord d’exportation entre les Etats-Unis et la Chine. En tomber de rideau, «Dans le cerveau de Bill Gates» trouvera finalement toute sa résonance. Alors que les équipes de la start-up TerraPower sont sur le point d’offrir au monde un nouvelle énergie nucléaire propre capable de supplanter les énergies fossiles, les accords commerciaux s’invitent au bal des idéaux perdus. A sa manière et au-delà du portrait de Bill Gates, «Dans le cerveau de Bill Gates» nous rappelle ô combien le futur de notre planète est empêtré dans les maillages de la politique internationale. Au tour de Donald Trump de manger sa volée de bois vert dans le final, savamment orchestré, de cette mini-série consacrée au géant de la tech.
En bref!
Aussi inspirant soit-il, le portrait de Bill Gates sera sans doute moins passionnant que les projets de la «Bill & Melinda Gates Foundation» et les facteurs qui en vouent certains à l’échec. Davis Guggenheim frappe ici moins fort que dans «Une vérité qui dérange», peut-être plus dispersé dans le propos, mais percutant, encore et toujours!
3,5/5 ★
Disponible dès maintenant sur Netflix.
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