Article2. Oktober 2023 Cineman Redaktion
Everybody's Perfect 2023, les coups de cœur d’un festival tourné vers le cinéma queer
Seul festival de cinéma queer de Suisse romande, Everybody's Perfect se tiendra du 6 au 15 octobre prochain à Genève. À cette occasion, nous avons sélectionné pour vous certains des films les plus marquants de cette édition.
(Un article de Marine Guillain)
«Brainwashed: sex-camera-power»
Aviez-vous déjà remarqué qu’à l’écran, les femmes sont plus souvent dénudées que les hommes, et apparaissent davantage dans des postures glamour et de séduction? Probablement. Mais aviez-vous déjà noté à quel point c’est fréquent, et à quel point les choix de mise en scène véhiculent des idées qui se répercutent, encore et encore?
Dans son documentaire, Nina Menkes décortique plan par plan certaines scènes de grands classiques du cinéma. «Le Mépris» (Godard, 1963), «Raging Bull» (Scorsese, 1980), «Requiem for a Dream» (Aronofsky, 2000), «Once Upon a Time… in Hollywood» (Tarantino, 2019), «Scandale» (Jay Roach, 2019)... Tout y passe. Même certaines réalisatrices, à travers lesquelles Nina Menkes pointe la façon dont, même chez les femmes, l'apprentissage du métier de cinéaste peut conduire à reproduire les schémas du male gaze, inconsciemment ou non. Le documentaire jette ainsi une lumière crue sur la construction d’une société qui cantonne les femmes à l’éros et au statut d’objet. Une leçon de cinéma édifiante, qui changera probablement à tout jamais la manière de regarder un film.
«Mutt»
En France, le long métrage de Vuk Lungulov-Klotz est sorti sous le nom de «24 heures à New-York». Le réalisateur trans serbo-chilien ayant grandi aux États-Unis s’inspire de son vécu et filme Feña (hypnotique Lio Mehiel), jeune homme transgenre qui, en l’espace de 24 heures, voit revenir dans sa vie des proches avec qui il a perdu le contact depuis sa transition: son père chilien, son ex-petit ami hétérosexuel et sa demi-sœur de 13 ans. Au plus proche du réel, ce portrait est aussi pudique que touchant, avec un aspect pédagogique qui ne tombe jamais dans la moralisation ou la victimisation.
«Orlando, ma biographie politique»
Docu-fiction qui ne ressemble à rien d'autre, «Orlando, ma biographie politique» est presque impossible à décrire, tant il faut le voir pour le comprendre, et tant les mots manquent pour représenter son puissant impact. En 1928, Virginia Woolf écrivait Orlando, roman dans lequel le personnage principal change de sexe au milieu de l'histoire. Presqu’un siècle plus tard, l'écrivain et militant transgenre Paul B. Preciado réunit 26 personnes trans et non-binaires de tous âges, pour incarner Orlando dans un film hommage adressé à l’écrivaine. Acclamé à la dernière Berlinale, ce métrage se révèle poignant, drôle, créatif, intelligent, hors normes et percutant.
«About Us But Not About Us»
Aux Philippines, un professeur de littérature à l’université mange au restaurant avec un de ses étudiants. Lieu unique, plans peu nombreux, presque aucun artifice: durant les 90 minutes que dure le film, Jun Robles Lana filme leur face-à-face. En ressort un thriller psychologique efficace, avec des secrets révélés au compte-gouttes, au cours duquel on ne voit pas le temps passer.
«Marinette»
Si vous avez manqué «Marinette» lors de sa sortie en salle cet été, c’est l’occasion de se rattraper. Mené par l’excellente Garance Marillier (qui a déjà fait ses preuves dans «Grave», de Julia Ducourneau, et dans «Madame Claude», sur Netflix), le biopic de Virginie Verrier raconte le parcours de la footballeuse française Marinette Pichon: sa détermination sans faille, son succès en équipe de France puis dans un club américain et son combat pour que le statut professionnel des joueuses soit reconnu au même titre que les hommes.
Un film aussi passionnant qu’édifiant, qui met en lumière une joueuse bien moins connue que n’importe quel footballeur de l’équipe de France. Pourtant, elle détient le record absolu de buts par match et de sélections en équipe nationale - tous genres confondus…
«20 000 espèces d'abeilles»
Dans le Pays Basque espagnol, une enfant qui ne se conforme pas aux codes de la société crée la gêne dans son entourage, sans comprendre pourquoi. Carcans, regards des autres, pudeur et honte mettent en danger son épanouissement. Cette fiction d’un peu plus de deux heures mise en scène par la réalisatrice Estibaliz Urresola émeut par sa beauté, sa douceur, et fait surtout mouche en plaçant le regard du public à hauteur d’enfant, là où les injonctions n’existent pas (encore). L’actrice principale de 9 ans, Sofía Otero, a remporté grâce à sa performance inoubliable l'Ours d'argent de la meilleure interprétation lors de dernière la Berlinale.
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