Interview15. Januar 2024 Cineman Redaktion
Vincent Macaigne et Stacy Martin : «Une peinture peut donner beaucoup d'informations si on la laisse venir à soi»
Mis en scène par Martin Provost, le film «Bonnard, Pierre et Marthe» a été présenté au dernier Festival de Cannes. À cette occasion, Vincent Macaigne et Stacy Martin s’était confiés sur la peinture, la résonance de l’œuvre de Pierre Bonnard et l’amour.
(Propos recueillis et mis en forme par Marine Guillain. Depuis le Festival de Cannes 2023)
«Bonnard, Pierre et Marthe» retrace la vie du peintre français Pierre Bonnard (Vincent Macaigne) et de sa muse et épouse Marthe (Cécile de France), sur cinq décennies. Le tournage s’est déroulé l'été 2022, essentiellement dans le Vexin sur les bords de Seine.
«Martin Provost adore montrer la nature, les mouvements, le vent, les couleurs, ça fait partie de son cinéma», explique Stacy Martin qui joue Renée, la maîtresse de Pierre. «Pour ce film, il voulait que ce soit de vrais lieux, habités, qu'il y ait une histoire. La maison dans laquelle on a tourné existe vraiment. En tant qu'acteurs, c'était génial, car on était plongés dedans, coupés du monde, et on avait l'impression d'être dans leur époque.»
Si Renée occupe une grande place dans l'œuvre de Pierre Bonnard, on trouve en réalité peu d’informations sur sa personnalité et sur sa vie. La première source d’inspiration de Stacy Martin a donc été la peinture: «On est partis des tableaux de Bonnard, de la façon dont elle était représentée, de ses postures. Elle semblait avoir une joie de vivre, une légèreté, et j'ai puisé là-dedans. Une peinture peut donner énormément d'informations si on la laisse venir à soi.»
De son côté, Vincent Macaigne a vraiment découvert Pierre Bonnard grâce au film et a adoré donner vie à cet artiste, moins renommé que d’autres peintres de son époque: «Il est étonnement plus connu à l'étranger qu'en France. Pourtant, il est légendaire et a inspiré beaucoup d'artistes, de grands écrivains et de grands cinéastes. L’incarner n'était pas un travail facile, mais c'était passionnant. Ses tableaux forment une histoire, ce sont aussi les héros du film, car la vie privée de Pierre se raconte dans son œuvre. Selon moi, le film ouvre des grilles de lecture immenses sur sa vie privée.»
Désormais fin connaisseur, l’acteur est aussi admiratif qu’intarissable sur l'œuvre de Bonnard: «C’était un génie! Il a su ramener des couleurs très vives, c’était novateur à l'époque. Il y a aussi beaucoup de profondeur et de complexité, Bonnard était un acharné du travail, un vrai perfectionniste et son œuvre est hallucinante. Alors qu’il était dans des cercles d'artistes intellectuels à Paris, Marthe l’a tiré vers la nature, et on sent cette lumière et cette simplicité arriver dans ses tableaux, les faire évoluer. Cette rencontre l'a peut-être sauvé de la ville et de la mondanité.»
Dans «Bonnard, Pierre et Marthe», les deux amoureux s’aiment, se déchirent, s’aiment encore plus… Le long métrage met définitivement la passion au centre. Alors que raconte-t-il de l’amour? «Plein de choses!» assure Stacy Martin. «L'amour peut être tragique ou apporter beaucoup de joie. L’amour, c'est aimer une couleur, une sensation, une feuille, un café, une personne, une conversation... Le film est un biopic, bien sûr, mais c'est surtout une ode à la joie sur l’amour, la peinture et l’inspiration.»
«C'est complexe», estime quant à lui Vincent Macaigne, «mais Martin Provost n'émet pas de jugement. Tous les personnages sont critiquables, surtout Pierre, qui est perdu entre deux femmes. Ce qui est toutefois beau et émouvant, c'est que c'est un film de haute fidélité. Le couple passe des épreuves, se pardonne, leur attachement est plus fort que tout. Le film est construit sur une trame dramatique, et il raconte aussi que, même pour celui qui était surnommé «le peintre du bonheur», la vie est emplie de complexité, de violence et de drame.»
Stacy Martin est arrivée sur le tournage alors que Vincent Macaigne et Cécile de France y étaient déjà depuis quelques semaines: «Comme mon personnage, j’ai dû trouver ma place. C’était du bonheur, car j’ai été accueillie à bras ouverts par deux super acteurs! Quant à Martin, je rêvais de travailler avec lui depuis que j’avais vu «Séraphine». Sa curiosité et la douceur avec laquelle il aborde les choses m'ont inspirée. Il a une grande tendresse envers ses personnages, qu’il montre complexes, multiples, sans clichés. C'est quelqu'un de passionné, qui encourage énormément.»
Résolument féministe, comme en attestent ses précédents métrages («Séraphine», «Violette» ou encore «La bonne épouse») Martin Provost donne dans son dernier film une place essentielle aux femmes. «Il est très fort, il raconte les non-dits et les émotions des femmes à cette période-là. Elles sont pleines de vie, elles ont un grand potentiel, et en même temps, elles sont déconstruites et démunies face à la société dans laquelle elles vivent. Renée commence son parcours en étant totalement libre, et elle en finit morte, c'est tragique. La pression sociétale du mariage et des enfants l'a mise en danger. Moi, j'adore la peinture et les histoires d'amour, alors c'était un peu le film de ma vie!»
Au cinéma le 17 janvier.
Plus d'informations sur «Bonnard, Pierre et Marthe».
Bande-annonce de «Bonnard, Pierre et Marthe»
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