Critique15. März 2024

«La Fièvre» sur Canal+, le football, catalyseur des fractures identitaires

«La Fièvre»  sur Canal+, le football, catalyseur des fractures identitaires
© Thibault Grabherr/QUAD+TEN/CANAL+

Le créateur de «Baron Noir» Eric Benzekri revient avec une nouvelle série en immersion dans la France contemporaine et son identité fracturée. Résolument politique et analytique, coup de projecteur sur «La Fièvre» à découvrir dès le 18 mars sur Canal+ et sur myCANAL.

L’heure est à la fête. C’est la soirée des Trophées du football et tout le gratin du milieu est présent pour célébrer les meilleurs joueurs français. Mais la soirée tourne au vinaigre lorsque Fodé Thiam (Alassane Diong), joueur star du Racing, frappe soudainement son entraîneur (Pascal Vannson) au beau milieu de la cérémonie avant de le traiter de «sale toubab», «blanc» en Wolof. Dans le public c’est l’incompréhension. Une équipe de communication de crise est appelée en renfort par François Marins (Benjamin Biolay), le président du Racing, afin de gérer la bombe médiatique qui s’apprête à s’abattre. Parmi cette équipe, Sam Berger (Nina Meurisse), ancienne communicante politique, ne prédit rien de bon à propos de cette crise qui risque de durer plus longtemps que prévu.

Suite à cet évènement, l’opinion publique se forge en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, accélérée par la toute puissance des réseaux sociaux. Tout le monde y va de sa petite analyse, notamment une personne, Marie Kinsky (Ana Girardot). Jadis proche collègue de Sam, Marie se produit désormais tous les soirs dans un théâtre bondé pour exposer ses opinions droitistes. Galvanisée par la sidération générale liée au coup de sang de Fodé, la polémiste va instrumentaliser l’évènement pour faire germer parmi la population les graines de ses idées extrémistes.

© Thibault Grabherr/QUAD+TEN/CANAL+

Il ne s’éloigne jamais beaucoup du champ politique, Eric Benzekri avait déjà conté un récit autour de la vie politique dans «Baron Noir». Si dans «La Fièvre», dans laquelle Benzekri collabore à nouveau avec Ziad Doueiri à la réalisation, il n’est pas question de corruption ou trahison dans les hautes sphères dirigeantes, le scénariste et créateur du programme analyse les enjeux politiques à travers le prisme du sport le plus populaire du globe. Catalyseur des enjeux sociétaux, le football comme scène de la crise identitaire que subit la France.

«La Fièvre», titre référence à un passage du livre testament de Stefan Zweig, «Le Monde d’hier. Souvenir d’un Européen», dresse un portrait juste et efficace de la société française, un portait qui pourrait tout aussi bien dépeindre les fractures sociales internationales. Cette fièvre, dont parlait Zweig dans les années 30, est toujours vivace et sa force est décuplée par le pouvoir anarchique des réseaux sociaux, arme de destruction massive de toute réflexion sensée et éclairée et dont chacun est à la fois victime et coupable.

Avec des dialogues denses et pertinents, on passe en revue des concepts comme la fenêtre d’Overton, et un casting percutant, avec en tête de gondole une Nina Meurisse excellente, les 6 épisodes de «La Fièvre» livrent une analyse intelligente d’une France fragilisée, d’un pays fébrile prêt à imploser.

4,5/5 ★

A partir du 18 mars sur Canal+ et myCANAL

Bande-annonce de «La Fièvre»

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