Critique11. August 2023 Cineman Redaktion
Locarno 2023 : «The Old Oak», les murs pour témoins
Sélectionné en compétition à Cannes cette année, «The Old Oak» était projeté à Locarno devant une Piazza Grande bondée, pour se terminer sur une standing ovation. L’histoire raconte l’arrivée de réfugiés syriens dans un village anglais, ancienne cité minière délaissée des pouvoirs publics.
(Une critique de Laurine Chiarini depuis Locarno)
En 2016, un car de réfugiés syriens débarque dans une bourgade du nord-est de l’Angleterre. Accueillis par certains avec hostilité dans une région déjà défavorisée, le rapprochement des communautés sera possible grâce à l’amitié qui se noue entre Yara, jeune photographe, et TJ, propriétaire du Old Oak, dernier pub du village.
Sur les murs du pub, des photos de la grève des mineurs de 1984. Photographe, c’est aussi la passion de Yara, jeune Syrienne réfugiée en Angleterre avec sa famille. Devant faire face à l’hostilité de certains habitants, elle va se lier d’amitié avec TJ, propriétaire de l’établissement. Le récit suit l’arrivée des réfugiés et leur intégration, forcément chaotique, dans la petite bourgade. «Vous n’avez qu’à retourner chez vous», leur lance un villageois. «C’est bien ce que nous aimerions», lui réplique Yara. Défavorisés, oubliés des politiques, les habitants au quotidien déjà difficile se retrouvent en plus à gérer l’arrivée imposée de ces nouveaux voisins
Troisième opus de Ken Loach à se dérouler dans le nord-est de l’Angleterre, le film clôt une trilogie «accidentelle», comme l’explique la productrice Rebecca O’Brien, mais en délaissant cette fois le tragique. Après «Moi, Daniel Blake» et «Sorry we missed you», tourner à nouveau dans la région tenait presque de l’évidence. Pour les habitué-e-s du réalisateur britannique, son film n’est pas une surprise. Prenant la défense des personnes laissées pour compte, il livre un long métrage socialement engagé. Mais le personnage principal est cette fois-ci un établissement : «The Old Oak», pub britannique tout ce qu’il y a de plus typique.
En 2008, une étude avait calculé que chaque jour, 5 pubs en Grande-Bretagne fermaient. Institution sociale, le pub n’est pas qu’un bar : c’est un lieu où tous et toutes se retrouvent, un pilier de la communauté locale. En faire le centre névralgique de l’histoire permet également de la filmer de l’intérieur. Le cinéaste ayant une idée précise de l’endroit, les recherches ont été longues pour trouver ce qu’il cherchait : un pub ayant traversé les époques depuis les années 70, mais encore «dans son jus». Posément et sans artifices, le résultat est une histoire humainement efficace qui prouve, s’il le fallait, que le cinéaste de 87 ans n’a rien perdu de sa verve.
3,5/5 ★
Le 25 octobre au cinéma en Suisse.
Plus d'informations sur «The Old Oak».
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