Critique8. September 2023
Mostra 2023 : «The Promised Land», Mads Mikkelsen à la conquête des plaines sauvages
Mads Mikkelsen, l’acteur danois le plus célèbre du moment, débarque sur le Lido dans un film en costume des plus classiques, mais diablement efficace.
(Critique de Damien Brodard, depuis la Mostra de Venise)
Danemark, 1755. Désireux d’obtenir des titres de noblesse, le Capitaine Ludvig Kahlen (Mads Mikkelsen) se lance pour mission de coloniser les terres encore indomptées et inhospitalières du Jutland. Très vite, ce dernier est confronté au seigneur local, Frederik de Schinkel (Simon Bennebjerg), qui n’entend pas laisser quiconque s’emparer de la lande, même au nom du roi.
Retour au pays pour le réalisateur danois Nikolaj Arcel qui, après un passage aux Etats-Unis complètement raté avec La Tour sombre (2017), se remet sur les rails avec un film d’époque efficace et de belle facture. Avant toute chose, il est bon de préciser que The Promised Land ne brille pas par son originalité. Rien ne sort des sentiers battus, on pourrait même lui reprocher son académisme. Pourtant, tout classique qu’il est, lorsqu’un film de cet acabit est joliment mis en images, agréable à suivre et bien interprété, quel plaisir ! L’intrigue débute avec un Mads Mikkelsen fidèle à lui-même, incarnant un guerrier désabusé que l’on croit d’abord monolithique, mais c’est sans compter sur le talent de l’acteur qui imprègne progressivement son personnage d’une fragilité saisissante. Preuve que le comédien Danois sait se montrer subtil, malgré un rôle qui se rapproche a priori de ce qu’on lui propose outre-Atlantique.
Il en va de même pour le récit d’ascension sociale, partant d’archétypes bien connus pour développer les relations entre des personnages plus profonds et complexes que ne laisse sous-entendre l’entame du long-métrage. Seul point noir à ce niveau, l’antagoniste fait pâle figure en comparaison des protagonistes, tant sa caractérisation de grand vilain tyrannique frôle le stéréotype bas de gamme. Toutefois, l’écriture expose de manière plutôt remarquable les rapports de pouvoirs dans la quête de reconnaissance de Kahlen, méprisé par les puissants, et son rapprochement avec les paysans. On notera également que le personnage féminin incarné par Amanda Collin bénéficie d’une exposition et un traitement bien plus important qu’à l’accoutumée dans ce genre de grandes fresques historiques.
Nikolaj Arcel réalise son sixième long-métrage sans fioritures, mais en parvenant à capter par le biais de fantastiques plans larges la beauté de la nature indomptée, sa capacité de destruction ainsi que sa fonction nourricière. Ce dernier peut compter sur le travail admirable du directeur de la photographie Rasmus Videbæk qui nous gratifie de plans sidérants, magnifiés par la lumière naturelle. The Promised Land est un spectacle haletant, une sorte de Western danois solidement conçu, dont les qualités surpassent largement son académisme manifeste.
4/5 ★
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