Netflix: «Crime Scene: The Vanishing At The Cecil Hotel» - Elisa Lam entre film noir et rollercoaster médiatique

Sous la direction de Joel Beringer, réalisateur de «Conversations with a Killer: The Ted Bundy Tapes», Netflix entame une série d’anthologie sur les traces de célèbres scènes de crimes. À la croisée des horreurs, cette première saison, dévoilée sur 4 épisodes, nous promène dans les couloirs du Cecil Hotel de Los Angeles pour nous conter l’une de ses plus célèbres affaires, la disparition de la jeune étudiante Elisa Lam.

«Low daily, weekly rates. 700 Rooms» peut-on lire sur la façade de l’hôtel; 700 chambres et un pedigree à vous faire froid dans le dos. Meurtres, overdoses, comme nous l’explique sa manager, en 10 ans d’exercice elle a recensé près de 80 cadavres et des milliers d’appels au 911… Situé dans la zone reculée de Skid Row à Los Angeles, dans le décor d’un Los Angeles à la John Carpenter et au cœur de la plus forte concentration de sans abris de tous les États-Unis, le Cecil Hotel s’est forgé la réputation d’un manoir des horreurs.

(Spoiler alert: Cet article contient quelques révélations, mais ne dévoile aucune information majeure sur le déroulé de l'enquête)

Un ancien hôtel de luxe dans les années 20 aux tentures art-déco majestueuses, puis la Grande Depression y décrochera les belles tapisseries au couteau pour trouver refuge dans les confins du crime. Parmi ses résidents, jadis, Richard Ramírez (aka The Night Stalker), célèbre serial killer du milieu des années 80; et pour quelques dollars la nuit, le Cecil offrait une chambrée pour ceux qui ne pouvaient être acceptés ailleurs. Une zone délibérément laissée en friche par la municipalité, où la violence s’abreuve de la misère environnante, et c’est dans ce décor qu’en 2013 la jeune étudiante canadienne Elisa Lam posera son sac à dos pour quelques jours.

«Il semble en effet qu’elle n’ait jamais quitté l’hôtel...»– Théo Metais

San Diego, Los Angeles, Santa Cruz, San Francisco... étudiante et insatiable blogueuse, en janvier 2013 Elisa Lam quitte la neige hivernale de Vancouver et déploie ses ailes en Californie. Un voyage sagement planifié qu’elle dévoile sur Tumblr et qui s’entame innocemment au Cecil Hotel. Mais le 31 janvier, et alors qu’elle est censée partir pour Santa Cruz, ses parents n’ont plus de nouvelle. De sa dernière apparition ne restent qu’un témoignage dans une librairie et une vidéo de surveillance dans l’ascenseur à l’hôtel, où elle fait preuve d’un comportement inexplicable. Dès lors le LAPD déploie l’artillerie lourde pour retrouver la jeune Élisa, mais très vite les recherches prennent une drôle de tournure, il semble en effet qu’elle n’ait jamais quitté l’hôtel.

Entame d’une affaire des plus étranges qui trouvera un écho médiatique sans précédent. La vidéo de l’ascenseur sera vue sur Youtube plus de 28 millions de fois et Joel Beringer propose une narration à la Cluedo pour venir à bout du cas Elisa Lam. Bien plus triste que la plus sordide des spéculations, une affaire de disparition prise aux pièges de l’inconscient collectif et de la myriade de pseudo-détectives 2.0 qui condamnèrent un innocent sur la toile. Les personnalités se dévoilent au fil d’un montage sous haute tension qui n’oublie pas de mettre à l’honneur les écrits d’Elisa Lam sur son blog. La manager de l’hôtel, un employé, un ancien résident, des enquêteurs du LAPD, des historiens, un couple en visite à l'hôtel lors du drame et certaines de ces personnalités d’internet viennent apporter leur éclairage sur cette tragédie et l’engouement médiatique qui s’en est suivi.

«Il faudra avoir les nerfs solides pour ne pas sombrer du mauvais côté de la raison...»– Théo Metais

De sa personnalité bipolaire, jusqu’au tomber de rideau final, rien de bien neuf ici pour quiconque est déjà familier à l’histoire, or le documentaire s’offre quelques moments d’une rare intensité lorsqu’il nous plonge dans la psychologie folle à lier des détectives amateurs et leurs théories complotistes. Une synchronicité surréaliste, de l’analyse de la vidéo de surveillance à l’effroyable ressemblance avec le film «Dark Water», en passant par l’acronyme d’un test de tuberculose, il faudra avoir les nerfs solides pour ne pas sombrer du mauvais côté de la raison.

Un documentaire pour les aficionados de la chambre 309 du film «Four Room»! Blague à part, «Crime Scene: The Vanishing At The Cecil Hotel» est ce documentaire entre film noir et rollercoaster médiatique, qui ne manque pas de rendre hommage à la personnalité d’Elisa Lam, sa plume d’une tendre et touchante sincérité, et son héritage pour celles et ceux que son destin a chamboulé. Cette histoire vous habitera et pour longtemps c'est certain. Le mot de la fin reviendra sans doute au Dr. Doug. Mungin, historien de Skid Row, qui n’oublie pas de remettre ce drame dans le contexte scabreux du quartier. Et de conclure, «Combien d’affaires Elisa Lam avons-nous raté?».

3,5/5 ★

Disponible dès maintenant sur Netflix

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