Critique14. August 2020 Theo Metais
Netflix: «Project Power» - Un complot pharmaceutique en Nouvelle-Orléans
Les comparses Henry Joost et Ariel Schulman, co-réalisateurs des derniers «Paranormal Activity», débarquent sur la plateforme flanquée d’un “N” rouge avec «Project Power», l’histoire d’un complot pharmaceutique et de pilules «super-héroïques» qui mettent la Nouvelle-Orléans à feu et à sang. Un sujet qui emprunte à «Limitless», trempé dans les bas-fonds de la pègre et porté par un trio attachant: Jamie Foxx, Joseph Gordon-Levitt et Dominique Fishback.
Biggie, un magnat de la tech (Rodrigo Santoro), a développé de mystérieuses pilules, si puissantes qu’elles développent des pouvoirs surhumains. Vendues dans les rues de la Nouvelle-Orléans, ses effets sont instables, invisibilité, force décuplée, la transe ne dure que quelques minutes, d’ailleurs il faut l’injecter pour en découvrir le pouvoir, d’autres explosent littéralement. Au milieu de la pègre, la jeune Robin (Dominique Fishback) deale pour payer les frais de santé de sa mère, protégée par Frank (Joseph Gordon-Levitt) un flic des stups aux méthodes peu orthodoxes, alors qu’Art (Jamie Foxx) tente de récupérer sa fille kidnappée.
Un univers teinté d’une légère science-fiction pour infuser à l’histoire un soupçon de distance et laisser l’esprit divaguer. La parabole est (presque) limpide, «Project Power» est à ce point ancré dans le réel que les berlingots magiques nous racontent une réalité bien tangible, celle du crack et autres substances «super-héroïnes». Une autre réalité aussi, celle d’un fléau quasi endémique, et qui frappe la rue et les minorités.
«Empruntant aux divinités Marvel, DC, Matrix, et à une esthétique neo-noir...»
La dépendance précédant la folie, le grand Biggie prêche la souveraineté des êtres dits évolués. Et alors qu’il s’est emparé de la fille d’Art, le père kidnappe gentiment Robin, pour remonter à la source et venger sa progéniture. Doucement, ils s’apprivoisent, les deux poursuivent en réalité les mêmes buts: endiguer le fléau, sevrer la ville et celer Biggie. Frank aussi, loup solitaire chez les stups, sorte de grand-frère qui assure les arrières de sa protégée Robin. Pas sûr que le duo Henry Joost et Ariel Schulman ne transcende le genre, or le scénario composé par Mattson Tomlin, crédité à l’écriture du prochain «The Batman» avec Robert Pattinson, a de la ressource. Empruntant aux divinités Marvel, DC, Matrix, et à une esthétique néo-noir, planqué derrière un nom franchement palot, «Project Power» montre les crocs.
Un trio de tête attachant, Dominique Fishback dans son rôle de jeune dealeuse et apprentie rappeuse est tout à la fois: drôle, rayonnante, touchante, insolente, à l’image des deux professionnels Joseph Gordon-Levitt et Jamie Foxx qui naviguent ici en eaux claires. Pas sûr non plus que la bobine ne rayonne par son inventivité, mais injectée de solides courses poursuites, et ce dès l’entame avec Machine Gun Kelly en flamme ou Joseph Gordon-Levitt à la poursuite d’un braqueur invisible, la caméra de Michael Simmonds («Halloween») tient la barre. «Project Power» emboîte un objectif précis, le divertissement est assuré.
«On regrette une envergure et une excentricité plus folle encore...»
À la fois censé, lorsqu’il parle, par exemple, d’une ville et d’une communauté noire étouffée par le système en col blanc, mais attendu, lorsque la réalité ne sert qu’au décorum du scénario, «Project Power» ne s’aventure jamais au-delà de l’énoncé initial. Le film marche droit, tout droit, sans anicroche, et l'on regrette une envergure et une excentricité plus folle encore pour réellement convaincre, à l’image de ses antagonistes, et du personnage tristement plat du grand vilain interprété par Rodrigo Santoro (malgré une transformation d’un genre «Dr. Jekyll and Mr. Hyde»), ou Amy Landecker («Transparent») complètement à l’arrière-plan.
Comme le rappelle le récent classement des acteurs les mieux payés au monde selon le magazine Forbes, Netflix, majoritairement responsable des fortunes du haut du panier, est une fabrique, non pas en, mais de cartons, enchaînant les succès. À ce jeu, «Project Power» sera l'une de ces productions enthousiasmantes, investies d’une énergie indéniable et servies dans un écrin SF super héroïque globalement efficace avec un casting de choix, histoire de ravir les aficionados du genre sur la plateforme au “N” rouge. Il n'en reste pas moins une histoire très vite oubliée.
3/5 ★
Disponible sur Netflix
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