Las herederas Brésil, France, Allemagne, Norvège, Paraguay, Uruguay 2018 – 95min.

Critique du film

Portrait d’une femme libérée

Clélia Godel
Critique du film: Clélia Godel

Premier long-métrage du réalisateur paraguayen Marcello Martinessi, Las Herederas a reçu un accueil favorable dans de nombreux festivals. Reparti notamment avec trois récompenses lors de la Berlinale de 2018 (Prix de la critique internationale, Prix Alfred Bauer et meilleure interprétation féminine pour Ana Brun), le film dresse le portrait intimiste d’une quinquagénaire qui redécouvre la liberté.

Lauréate de l’Ours d’Argent de la meilleure actrice à Berlin,Ana Brun, dont c’est le premier rôle, incarne avec finesse et subtilité cette héritière confrontée à un nouveau chapitre de sa vie. Personnage plus complexe qu’il n’y paraît, Chela ne nous est pourtant pas présentée sous son meilleur jour : avec son visage fermé et son air triste, les premières scènes peinent en effet à rendre cette femme sympathique et il faut attendre l’arrestation de Chiquita pour commencer à voir Chela sortir lentement de sa carapace et gagner en assurance.

La mine morne dévoile alors progressivement des sourires et Chela semble goûter à un vent de liberté qu’elle croyait avoir perdu. Particulièrement bien écrites, les scènes qu’elle partage avec la séduisante Angy auront notamment un effet positif sur son mode de vie, qui s’éloignera doucement de la monotonie passée. Ce changement se transcrit également dans la mise en scène puisque l’ambiance oppressante causée en partie par les décors sombres du début laissera place à une caméra plus mobile accompagnée d’images chaleureuses et colorées.

Mais si le réalisateur Marcello Martinessi parvient à dresser le portrait de cette femme avec une grande douceur, on regrette qu’il se contente souvent d’enchaîner les mêmes types de scènes (les courses en taxi, les visites à Chiquita en prison, les ventes des biens de la maison) au lieu de renouveler son récit. Ce procédé a tendance à essouffler le rythme du film, déjà plombé par une narration qui prend son temps. Davantage de ferveur aurait sans doute pu donner un peu plus de force à cette jolie histoire.

En bref !

Emmené par une Ana Brun débordante de justesse, Las Herederas relate avec beaucoup de délicatesse et de pudeur la renaissance d’une femme forcée à s’émanciper. Si le film aurait gagné en profondeur en variant davantage son rythme et son propos, il n’en demeure pas moins un beau portrait féministe et plein d’espoir.

26.03.2024

3.5

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