The Last Black Man in San Francisco 2019 – 121min.
Critique du film
Les racines d’une vie
Présenté en janvier au festival Sundance, The Last Black Man in San Francisco fait sa première européenne à Locarno, en compétition. Une percée à travers les origines, incarnée par le combat sans faille de Jimmie (Jimmie Fails), bien décidé à défendre une maison familiale.
Jimmie (Jimmie Fails) est amoureux d’une maison dans le quartier de Golden Gate, à San Francisco. Lui et son pote Montgomery (Jonathan Majors) y passent souvent, pour la contempler, pour lui donner un petit coup de peinture, lui redonner de sa splendeur d’antan. Pourquoi? Car c’est le grand-père de Jimmie qui, en 1946, s’est dépatouillé pour la construire. Jimmie se battra pour récupérer ce bien, cette bâtisse si chère à ses yeux.
Premier plan, première incursion et nous voici bercés dans un torrent d’émotions. À la baguette, Joe Talbot nous catapulte - peut-on parler d’entame hypnotique? - dans une délicieuse photographie, chaude et enivrante. Une époustouflante entrée en matière qui explore un San Francisco lumineux, en suivant Jimmie sur son skate et Montgomery derrière, à courir après. Des débuts fracassants, où le cadre se mue en une fresque riche de détails, avant de reprendre son souffle, cadrant cette majestueuse maison à l’architecture victorienne. Pour Jimmie, cette demeure est son sang, son héritage. Lui à l’écart de sa famille, il retrouve son chez-soi avec cette maison, son cocon familial fantasmé. Même vidée de ses meubles, il revit et il se battra corps et âme pour la garder rien que pour lui.
The Last Black Men in San Francisco respire la poésie visuelle. Une musique vous plongeant un peu plus dans une histoire belle d’amitié, belle de profondeur. Son ampleur plastique vous aspire. Talbot explore l’innocence de deux hommes, bousculés par la violence dont ils sont témoins, la solitude pointant le bout de son nez. Des moments déchirants mélangés à un ton plus léger. La narration évolue à un rythme effréné avant de reprendre un élan plus calme. Jimmie et Montgomery incarnent cet hymne déchirant et doux à la fois. Un retour aux sources, devant sa propre maison, censée représenter ses racines. Pour Jimmie, San Francisco n’est plus cette ville qu’il connaissait, celle de son grand-père. La gentrification est passée par là, pour souiller le quartier de son identité. Jimmie n’a plus sa place dans ce voisinage, ou plutôt dans cette ville. La fuite est inéluctable. À travers Jimmie, Greg Talbot brosse un beau portrait d’homme blessé et seul.En bref!
The Last Black Man in San Francisco brille dans sa première partie, avant de perdre en intensité, pour mieux explorer l’essence du récit. Un pas de côté pour mieux rebondir. Deux hommes à la recherche de racines, d’un socle familial, perdant leur innocence petit à petit, fatigués d’être rejetés par leur ville d’origine. Poignant.
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