Kritik22. Oktober 2019 Lino Cassinat
«Hors Normes» - La dernière séance toute en délicatesse d'Olivier Nakache et Eric Toledano
Depuis le succès massif d’«Intouchables», Olivier Nakache et Eric Toledano règnent en maîtres sur tout un pan du cinéma français ; celui d’une forme de comédie sociale pleine de bons sentiments, dont les détracteurs lui reprochent d’être consensuelle et inoffensive en plus de ne pas toujours être très délicate. «Hors Normes» pourrait, peut-être, changer cette image.
(Cannes 2019) Bruno et Malik vivent depuis 20 ans dans un monde à part, celui des enfants et adolescents autistes. Au sein de leurs deux associations respectives, ils forment des jeunes issus des quartiers difficiles pour encadrer ces cas qualifiés "d'hyper complexes". Une alliance hors du commun pour des personnalités hors normes.
Le film est à la fois un film somme de ce que le duo de réalisateurs nous a produit jusqu’à présent, et en même temps un premier pas assez réussi vers quelque chose d’autre et d’un peu meilleur. Marketé comme une comédie, si «Hors Normes» fait régulièrement sourire, le film est un drame social pur avec un sujet dur (ici, les cas d’autisme extrême) ; de sa première séquence-générique claustrophobe et paniquée à la dernière scène éprouvante du personnage interprété par Vincent Cassel.
Si la mécanique d’écriture du duo n’a pas changé, son ton a quelque chose de plus alarmé. La fin en suspens du film viendra confirmer d’ailleurs que l’objectif d’«Hors Normes» n’est pas du tout le même que celui des films précédents. Et contre toute attente, ce surplus de drame dans le cinéma un peu prêchi-prêcha d’Olivier Nakache et Eric Toledano vient apporter de la fraîcheur et de la vivacité à leur propos, alors qu’on le voyait l’alourdir encore.
«Un film qui ne prend jamais son public de haut...»
Alors, «Hors Normes» n’évite pas quelques scènes à la naïveté forcée, au naturalisme dissonant ou encore quelques emportements dignes des élucubrations de Francis Lalanne à chaque veille de scrutin. Mais c’est bien ce regain de gravitas, cet air de dire « attendez, on rigole mais en fait il y’a vraiment le feu » qui donne de la puissance au film. Hors Normes est un film qui ne prend jamais son public de haut malgré sa posture morale.
Sans changer de forme, l’humour a drastiquement changé de nature. On rit pour faire oublier qu’il est sur la brèche et que l’échec de ses personnages serait une catastrophe. C’est la première fois qu’Olivier Nakache et Eric Toledano parviennent à utiliser l’humour non pas comme contrepoint, mais comme vecteur du drame, et la fusion est globalement réussie. Bien sûr, on signifie par là que le film n’est pas parfait. «Hors Normes» s’appuie, par exemple, un peu trop sur l’énergie de ses comédiens, tous plus parfaits les uns que les autres, des vétérans aux nouveaux venus.
Le montage accuse parfois quelques paresses, notamment dans les scènes comiques, et certains effets de style sont un peu lourdingues. Mais le film réussit à la fois à être l’agrégat de tout ce que ses réalisateurs savent faire de mieux, tout en étant la promesse que leurs défauts vont se résorber. Et s’il faut choisir entre ce versant là de la comédie populaire française ou la kyrielle de pantalonnades bouffonnes et rances du type de Qu'est-ce qu'on a encore fait au Bon Dieu?, on est prêt à pardonner beaucoup de choses à cette lettre d’intention nouvelle et un peu maladroite parce que trop humaniste.
En bref !
«Hors Normes» a un souffle un peu trop emporté, mais indéniablement un souffle qui aère l’esprit.
3/5 ★
Plus d'informations sur Hors Normes. Au cinéma le 23 octobre 2019.
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