Farid Bentoumi mixe une histoire familiale à celle d’une entreprise empêtrée dans une histoire de pollution industrielle à grande échelle. Un thriller social et écologique labellisé Cannes 2020, qui plaît par la sobriété de son traitement.
À l’assemblée nationale française, le projet «Climat et résilience» s’apprête à être voté. Derrière ce débat ô combien important, l’avenir d’une entreprise et de centaines d’employés. 223 collaborateurs qui comptent sur Arkalu pour nourrir leurs familles. Nour (Zita Hanrot) arrive en tant qu’infirmière sur le site, après une erreur professionnelle dans son précédent emploi, pistonnée par son père, Slimane (Sami Bouajila). Petit à petit, la jeune femme va découvrir que la société cache des choses à propos de ses déchets et de la protection des ouvriers.
«Rouge» met en exergue le face-à-face d’un père qui évolue depuis 29 ans dans la même boîte et celui d’une jeune fille qui, armée de son professionnalisme, décidée d’accomplir son travail correctement. Mais cette attitude citoyenne peut entraîner la fermeture d’un site et envoyer une myriade de personnes au chômage. «Un chien ne mord pas la main de celui qui le nourrit» lui assène son père, campé par l’impeccable Sami Bouajila. Pour Nour, c’est à travers un constat alarmant d’un cuisinier aux problèmes respiratoires très inquiétants et jamais examiné depuis plusieurs années qui va lui exposer une vérité glaçante. Tout comme ces enveloppes compensatoires pour des intérimaires blessés sur le site, la société noie le poisson. À force de creuser, son père et le grand chef (Olivier Gourmet) vont tenter de la faire culpabiliser, de lui rappeler que l’importance se trouve ailleurs: les salaires qui tombent à la fin du mois.
Un subtil combat psychologique et écologique...
Tiraillée par l’aspect économique, sanitaire, mais surtout familial, Nour se positionne comme lanceuse d’alerte contre son gré. Avec l’aide d’une journaliste indépendante jouée par Céline Sallette, elle s’oppose à son père, s’oppose à sa famille - son beau-frère est également employé - pour atterrir dans la peau de la pestiférée. Farid Bentoumi conjugue plusieurs couches pour densifier un script signé en collaboration avec Samuel Droux, traversant une prise de conscience qui ôtera le sommeil à sa protagoniste principale, déboussolée par les décisions qu’elle doit prendre: d’un côté le paternel et de l’autre des hypothétiques morts à venir. «Moi je m’en fous de sauver les marmottes. Moi ce que je veux sauver, ce sont mes collègues, ces pères de famille qui triment pour nourrir leur famille» s’acharne Slimane sur sa fille. Le terme «famille» est usé jusqu’à la corde pour appuyer cette culpabilité toujours plus forte.
«Rouge» est un subtil combat psychologique et écologique, sous forme de trahison sans en être une. Aucun manichéisme, mais bien une pellicule qui se préoccupe des ambitions de chacun, sans jamais trop forcer sur le bien ou le mal. Farid Bentoumi fait naître un éclat, une conjonction entre 2 sphères pour faire naître l’éclat blanc de l’harmonie affective.
3,5/5 ★
Le 18 août au cinéma. Plus d'informations sur «Rouge».
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