Interview7. Oktober 2024

Céline Sallette et Charlotte Le Bon sur «Niki»: «Elle a traversé l'enfer et s'en est sortie grâce à la création»

Céline Sallette et Charlotte Le Bon sur «Niki»: «Elle a traversé l'enfer et s'en est sortie grâce à la création»
© Praesens-Film AG

Présenté au Festival de Cannes dans la section Un certain regard, le premier long-métrage de Céline Sallette, «Niki», sort en salle cette semaine. Charlotte Le Bon y interprète l’artiste-plasticienne avec une grande justesse. Rencontre.

(Propos recueillis et mis en forme par Marine Guillain)

Des tableaux de tir, où la toile se macule de peinture au hasard des coups de fusil. Des sculptures modernes et généreuses de femmes baptisées les «Nanas». L’épatant Jardin des tarots, en Toscane, parfaite représentation de l’univers de de Niki de Saint Phalle. Comment sont nées ces œuvres, aujourd’hui célèbres dans le monde entier? Elles symbolisent en réalité la renaissance de l’artiste, parvenue à s’émanciper d’une société partiarcale et à se libérer de ses traumatismes (inceste, drames familiaux) à travers l’art.

C’est cet aspect de sa vie qui a touché Céline Sallette en plein cœur, comme elle nous l’a expliqué lors de notre rencontre cannoise : «Lorsque j’ai lu la biographie de Niki de Saint Phalle, j’ai tout de suite su ce que je voulais raconter : sa transformation, le moment où elle est devenue elle-même. Le film démarre avec une image de Niki qui pose comme mannequin lors d’un shooting, comme un bijou ou un trophée, réduite au silence. À la fin, elle a les cheveux courts et tire des coups à la carabine. Je souhaitais raconter ce qu’il s’est passé entre les deux, le chemin qui l’a menée à entamer sa nouvelle vie.»

Immédiatement, Céline Sallette pense à Charlotte Le Bon pour interpréter Niki : «On m'a toujours dit que je lui ressemblais, nous confie l’actrice canadienne. J'ai vu son travail à différents endroits, elle a tellement de sculptures partout à travers le monde que j'ai l'impression que son travail fait partie de l'inconscient collectif. Après que Céline m'a approchée pour le rôle, j'ai lu tout ce que Niki avait écrit, j'ai analysé son travail, essayé de comprendre comment et pourquoi elle faisait les choses. J'y ai trouvé des liens très clairs entre son vécu et sa création.»

Céline Sallette et Charlotte Le Bon sur «Niki»: «Elle a traversé l'enfer et s'en est sortie grâce à la création»
Charlotte Le Bon dans «Niki» © Praesens-Film AG

Si Charlotte Le Bon se prépare à fond pour ce projet qui l’anime tant «des rôles comme Niki, ça ne se présente pas tous les matins!» lance-t-elle, elle part toutefois avec un avantage de taille. Baignant elle-même dans l’art depuis de longues années - elle a étudié les arts plastiques au Québec - , elle a aussi fait du mannequinat : «J'ai projeté beaucoup de choses puisque comme elle, j'ai détesté ce métier! Et puis quand je jouais Niki en train de créer ses œuvres, certains gestes m’étaient très familiers, donc je n'ai pas eu peur d’être à côté de la plaque. Je savais exactement ce que j'étais en train de faire, ce qui a été un poids en moins.»

Arrivée à un stade de sa carrière où l’envie de jouer était moins présente - Charlotte Le Bon a elle-même présenté son premier long-métrage à Cannes, le sublime «Falcon Lake», deux ans avant «Niki» - la Québécoise confie qu’il lui faut «de vrais challenges» pour la faire sortir de chez elle : «Là c’était un vrai challenge, d’incarner cette femme si flamboyante, et surtout d’incarner son triomphe. Elle a traversé l'enfer et s'en est sortie grâce à la création, je trouve ça glorieux et magnifique.»

De son côté, Céline Sallette avait déjà eu des projets de longs-métrages en tête avant de faire «Niki», mais aucun n’avait abouti. Avant elle, personne n’avait été autorisé à faire un film sur la plasticienne : «La petite fille de Niki a toujours refusé, car pour elle, c’était trop intime. Lorsque j’ai été en contact avec elle, je lui ai dit que selon moi, sa plus grande œuvre était le chemin qu’elle avait parcouru. Parvenir à se libérer d’un traumatisme à travers l’art et oser dévoiler publiquement l’inceste qu’elle avait subi, à cette époque, c’était vraiment précurseur. Ce qu’elle a fait pour se libérer et regagner de la force est exemplaire. Elle renaît avec les tirs sur ses tableaux, et ce sont ces œuvres qui la font naître internationalement. À la fin du film, commence sa vie. Sa libération est le sujet central du film.»

Au cinéma à partir du 9 octobre.

Plus d'informations sur «Niki»

Bande-annonce de «Niki»

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