Nouveau projet de l’auteur Dennis Lehane avec Taron Egerton, «Black Bird» (ou «In with the devil») se fait le récit sur 6 épisodes de cette entente particulière qui unira en prison un tueur en série et un détenu sous couverture.
Maître contemporain du roman policier, il n’est autre que l’auteur acclamé des romans «Shutter Island», «Gone Baby Gone» et «Mystic River». Ici, Dennis Lehane, producteur et scénariste, adapte un livre paru en 2010, «In With The Devil: A Fallen Hero, A Serial Killer, and A Dangerous Bargain for Redemption» («Avec le diable» en français) dans lequel James Keene, accompagné par Hillel Levin, y raconte sa propre histoire.
Considéré comme un hommage au Silence des Agneaux à sa sortie, “Jimmy” Keene y dévoile le récit de ses tribulations carcérales dans les années 90. Prodige déchu du football américain, fils respecté d’un officier de police de la banlieue de Chicago, James sera condamné à dix ans de prison pour trafic de drogue. Puis un beau jour le FBI viendra lui faire une offre que l’on ne peut décemment pas refuser : une promesse de liberté s’il parvient à recueillir la confession d’un certain Larry Hall, un détenu soupçonné d'être un tueur en série.
Ainsi, deux criminels se lient d’une troublante amitié dans l’unité psychiatrique de la prison de haute sécurité de Springflied. Paul Walter Hauser (fascinant), et Taron Egerton (léger) incarne cette alliance à la fois abjecte, et magnétique. L’histoire d’un homme seul et psychologiquement défait, et d’un autre, qui, pour laver son CV au karcher, tentera de lui tirer les vers du nez, espérant ainsi faire la lumière sur ses confessions à l'emporte-pièce. En découle un huis-clos carcéral porté par la solide régie du flamand Michaël R. Roskam (Bullhead), auquel se mêle une enquête sur les traces des corps éparpillés par Larry Hall et l’affaire Jessica Roach, fil rouge de cette mini-série.
la performance brillamment douce-amère d’un Paul Walter Hauser toujours plus déroutant...
L’occasion de retrouver un excellent Greg Kinnear, dans le rôle d’un enquêteur de l’Illinois, aux côtés d’une Sepideh Moafi à double tranchant, cerveau de cette alliance particulière. Et Black Bird marche sans encombre sur un chemin déjà tracé par ses pairs (True Detective, Zodiac et autre Seven), mais pas sûr qu'elle ne trouve son ton, son rythme. Et ce dès l’entame, très faiblement portée par la performance académique de Taron Egerton, sorte de mauvais American Psycho, et qui consacre un épisode entier à son arrivée en cabane. Les deux premiers épisodes dévoilés aujourd’hui piétinent, coupables d’un format sériel étiré et certainement peu adapté à cette histoire qui aurait mérité d’être plus compacte.
Ainsi, le remplissage est d’or et nous endort. Aussi touchant soit Ray Liotta, décédé en mai dernier, et ici dans l’un de ses derniers rôles dans la peau du père du fameux James Keene, son histoire ne fait qu’apporter un sous-texte à la trame narrative de son fils, alors que Dennis Lehane nous avait promis d’être enfermés «avec le diable». Et en comparaison, par exemple, avec l’ouverture magistrale de la première saison de True Detective, asphyxiante, clinique et portée par un duo d’acteurs en pleine maîtrise de leur art, Black Bird, paraît nettement plus dispersée, comme si jamais la série ne calibrait le centre névralgique de son scénario.
En définitive, Apple nous sert une histoire qui semble n’avoir d’autre dessein que de servir celui qui la raconte, à savoir James Keene lui-même, au lieu de véritablement passer au crible la psyché d’un fou. Et n’en déplaise à la réalisation pourtant réussie de Michaël R. Roskam et la performance brillamment douce-amère d’un Paul Walter Hauser toujours plus déroutant, la série rampe péniblement, lestée par des couches de scénarios accessoires. Mais son héritage cinéphile suffira certainement à justifier, sinon poursuivre, son visionnage.
3/5 ★
Les deux premiers épiosdes de Black Bird sont à découvrir dès aujourd'hui sur Apple TV+
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