Critique10. August 2020 Camille Vignes
«L’ours en moi» - Un documentaire sublime et sauvage
La fascination d’un homme pour les ours peut emmener très loin des équipes de tournage. Jusque dans les plaines reculées, froides et dépourvues d’homme d’Alaska. Mais si les conditions de vie dans cet environnement n’ont pas toujours dû être faciles, il n’en reste pas moins que la volonté du réalisateur suisse Roman Droux, volonté qu’il avait chevillée au corps, de rencontrer ces fameuses et fières bêtes brunes, a donné naissance à un documentaire sublime: «L’ours en moi».
Depuis toujours (ou presque) l’ours fascine autant qu’il terrifie. Alors quand il s’agit pour Roman Droux de réaliser son rêve, de partir à la rencontre de ces colosses aux confins de l’Alaska, le résultat ne pouvait être qu’à couper de souffle. Avec le biologiste David Bittner, il est entré dans le quotidien de cet animal captivant pour offrir le témoignage d’un monde fabuleux. Un monde sans homme ni civilisation, un monde ou la nature est reine, un monde qui offre en spectacle la bienveillance d’une mère pour ses oursons, autant que les combats majestueux de leur pairs mâles, prêts à tout pour triompher. Un monde qui plonge dans un règne animal aussi âpre qu’instructif. Un monde presque humain pour qui sait le regarder.
«L’ours en moi» est un souvenir d’enfance, un poème sortant du cœur, une ode à l’ours, l’interprétation d’une nature profonde, répondant à la nature humaine. Du petit ours beige nommé nounours, aux immenses bêtes brunes-noires, affublées sans le savoir de différents et affectueux surnoms, le réalisateur n’a fait qu’un pas. Un pas de géant pour nous, spectateurs, un pas logique et nécessaire pour lui, amoureux de la nature sauvage et puissante de l’ours. Une nature qui résonne tant en lui, avec laquelle il dialogue si simplement. Notre habitus est fait de monstres de métal, de champs d’asphalte, de vrombissement de moteurs et de nourriture livrée sur le pas de nos portes. Celui du cinéaste, qu’un temps il a partagé avec ces superbes animaux, n’a pas de limite. Il est peuplé de bêtes sauvages, de steppes canadiennes prises dans le grand froid du nord, de ronronnements étonnant d’oursons tétant leur mère, de repas frugales, partagés autour d’un réchaud, d’amitiés étonnantes.
«Une attendrissante compréhension de l’amitié qu’un homme peut nouer avec un animal...»
Techniquement, rien d’extraordinaire se détache vraiment de ce que les réalisateurs de documentaires ont l’habitude de présenter. Mais l’intérêt de «L’ours en moi» ne s’est jamais situé dans une maîtrise technique, un plan original, un habillage sonore grandiose ou jamais vu. Non. L’intérêt de «L’ours en moi» est bien plus simple, même si difficile, certainement, à vivre. L’intérêt de «L’ours en moi» est dans ses paysages sauvages et rudes, époustouflants, dans la complicité subtile entre des ours et un homme, des ours qui laissent cet homme vivre là, parmi eux, parce que ce dernier ne fait montre d’aucune hostilité. L’intérêt de «L’ours en moi» est dans un émerveillement à voir trois oursons apprendre à devenir adulte, dans une joie de retrouver, année après année, les mêmes têtes d’ours familières, dans une volonté de laisser faire la nature, même quand elle est cruelle. Bref, dans une attendrissante compréhension de l’amitié qu’un homme peut nouer avec un animal, une amitié qui rappelle celle qu’entretiennent un certain Petit Prince et un certain renard sauvage.
4,5/5 ★
Plus d'informations sur «L’ours en moi». Au cinéma le 12 août.
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