Critique6. November 2023 Maxime Maynard
«La Passion de Dodin Bouffant», un spectacle gourmet magnifique, mais fastidieux
Le réalisateur franco-vietnamien Anh Hung Tran revient avec «La Passion de Dodin Bouffant», une œuvre délicieuse, mais lourde, prix de la meilleure réalisation à Cannes 2023 et sélectionnée pour représenter la France aux prochains Oscars.
Au XIXe siècle, Dodin (Benoît Magimel) vit dans un château au milieu de la nature. Passionné par l’art culinaire, il passe son temps à étudier des menus et à préparer des plats complexes, aidé par sa cuisinière Eugénie (Juliette Binoche). Complices, les deux ont développé au fil des années des sentiments profonds l’un pour l’autre. Mais Eugénie préfère sa liberté et refuse toute demande en mariage.
Anh Hung Tran est un magicien de l’image. Son talent esthétique avait conquis les foules grâce à sa trilogie vietnamienne, débutée avec «L'Odeur de la papaye verte», Caméra d’or au Festival de Cannes 1993 et César du meilleur premier film en 1994-. Trente ans plus tard, le réalisateur n’a rien perdu de sa superbe. Dans «La Passion de Dodin Bouffant», son œil aiguisé s’associe à la photographie de Jonathan Ricquebourg pour créer une œuvre à la beauté grisante. De l’imposante cuisine du château, aux magnifiques espaces naturels, chaque scène, chaque plan se transforme en un tableau composé avec soin.
Adaptation du roman de 1924 «La Vie et la passion de Dodin-Bouffant gourmet» de l’écrivain franco-suisse Marcel Rouff, «La Passion de Dodin Bouffant» est une lettre d’amour à la gastronomie française. Dans leurs rituels journaliers, le public suit Dodin et Eugénie au potager pour cultiver les aliments, à la cuisine pour préparer les plats, au salon pour les déguster. Des instants d’exploration culinaire captivants et magnifiquement mis en scène, qui s’étirent malheureusement à outrance, empiétant sur une histoire au final bien superficielle. Si les passionnés seront rassasiés, les autres pourront frôler l’indigestion.
Pourtant, les quelques péripéties développées restent poignantes. La relation entre Dodin et Eugénie, délicatement mise en scène, émerveille par une alchimie extraordinairement palpable. Une complicité au moindre regard, au plus petit sourire, accentuée par le lien véritable entre les acteurs. Ainsi, si le baragouinage de Benoît Magimel s’accompagne souvent d’une expression guindée et irritable, son affinité avec Juliette Binoche allège le ton et donne naissance à de douces scènes, à de poétiques instants d’intimité. Mais si la beauté des images et des sentiments séduisent, «La Passion de Dodin Bouffant» reste un œuvre à la lenteur rapidement lassante.
3/5 ★
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Bande-annonce «La Passion de Dodin Bouffant»
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