À la recherche d’Ingmar Bergman Allemagne 2018 – 99min.

Critique du film

Ingmar Bergman, le précurseur du cinéma d’auteur

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Le natif d’Uppsala est fêté par Margarethe Von Trotta à travers un documentaire qui retrace l’oeuvre du metteur en scène suédois. Mort en 2007, Ingmar Bergman aurait eu 100 ans le 14 juillet dernier. L’occasion pour Von Trotta de rendre un hommage appuyé à l’un des précurseurs du cinéma d’auteur.

Margarethe Von Trotta, réalisatrice de Hannah Arendt en 2013, le dit à qui veut l’entendre : le jour où elle a vu Le Septième Sceau (1957), ce film a opéré sur elle comme une explosion. Ingmar Bergman est son maître, aussi simplement soit dit. Alors comment ne pas sauter sur l’occasion de lui tirer le portrait à travers de nombreux témoignages pour dessiner les contours d’un cinéaste d’exception, qui continue à inspirer les nouvelles générations. Réalisateur à la filmographie bien fournie, ponctuée de plus de 40 films, Bergman est aussi découvreur de talent comme en atteste la carrière de Liv Ullmann, mise en lumière dans Persona en 1966. Ici, Bergman est décortiqué avec habileté par Von Trotta dans un documentaire qui suit son processus créatif et sa manière de voir son oeuvre évoluer au fil du temps. Jean-Claude Carrière, par exemple, met le doigt sur une partie fascinante du cinéaste. Au début, les métrages du Suédois ont une part religieuse significative, mais plus il vieillissait, plus son cinéma devenait humain et délaissait l’impact religieux. Et d’ajouter « que Bergman a ouvert le cinéma après la guerre. »

Von Trotta, à travers des intervenants tels que Carrière, Liv Ullman ou encore Olivier Assayas, façonne l’image de Bergman et démontre l’emprise qu’il a eu sur des réalisateurs influents. Jean-Claude Carrière parle encore de cette atmosphère scandinave reconnaissable dans son travail. Olivier Assayas parle même d’un précurseur du cinéma d’auteur et de la modernité de son cinéma. Lui qui mettait en avant des femmes telles que Harriet Andersson, Liv Ullman ou encore Ingrid Thulin. Il vouait une grande admiration pour les femmes.

L’immersion est intéressante et développe plusieurs facettes d’un artiste un peu oublié par les générations contemporaines. Searching for Ingmar Bergman est un condensé d’échanges et d’anecdotes, le tout dans une atmosphère sympathique, parfois légèrement barbante. Les interventions du génial Olivier Assayas sont des petits instants de fraîcheur pour booster un documentaire réalisé à un rythme qu’on qualifierait de décontracté. On jurerait même que Von Trotta prend un peu trop son temps et s’enlise dans une nostalgie. Les passionnés de Bergman seront comblés, car Von Trotta s’intéresse aussi à l’homme, cinq fois marié mais avant tout cinéaste; un père de famille dévoué, plus fasciné par son travail que par sa vie privée. Bergman était un homme complexe au plus profond de son âme. Une pointe de prétention, mais également une vraie fascination pour l’art en général.

En bref ! Tourné sur un rythme de sénateur, Searching for Ingmar Bergman est un documentaire intéressant pour les personnes qui souhaitent (re)découvrir l’oeuvre du Suédois. En retraçant sa vie de cinéaste et en la couplant avec l’impact qu’a eu Bergman sur son propre travail, Von Trotta se plaît à poursuivre son premier coup de coeur et l’étudie de manière holistique. Hormis cette étude détaillée et personnelle, le film officie plus comme une piqure de rappel pour ne pas oublier l’oeuvre d’un cinéaste d’exception.

26.03.2024

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