Baracoa Colombie, Espagne, Suisse, Etats-Unis 2019 – 90min.
Critique du film
Diriger le direct
À la croisée du réel et de la fiction, Pablo Briones entend nous raconter avec Baracoa le dernier été de deux pré-adolescents à Cuba en les plaçant dans le dispositif de mise en scène bien particulier du docufiction, qui hybride les méthodes de captation propres à la fiction et celles du cinéma direct. Un genre extrêmement particulier et qui a généré de nombreux chefs d’oeuvres, mais dont on se demande s’il était le plus adapté pour raconter cette histoire.
Leonel a 9 ans, Antuán en a 13, et tous deux vivent dans le même village à Cuba. Malgré la différence d’âge, significative au début de l’existence où tout change très vite, ils sont les meilleurs amis du monde. Mais Antuán doit bientôt déménager à La Havane, et l’été qu’ils s’apprêtent à passer ensemble pourrait bien être le dernier.
On ne pourra pas faire le reproche à Baracoa de n’avoir pas osé relever un défi extrêmement difficile, à savoir faire du docufiction avec deux acteurs très jeunes. Ils sont d’ailleurs le meilleur atout du film, tant leurs personnalités attachantes rendent le film rayonnant. Cela étant, aussi instantanément aimables que soient Antuán et Leonel, leurs aventures lassent très rapidement, la faute à un dispositif de mise en scène qui dessert grandement leur histoire.
Contrairement au passionnant Moi, un Noir, dont les trois sujets magnifiaient leurs histoires grâce à la mise en fiction de leur réel et qui opérait une spectaculaire libération des personnages traversant le film, Baracoa à une tendance manifeste à enfermer ses sujets dans un carcan rigide de codes de teen-movie et du film d’errance assez ternes, pour ne pas dire plats. Guidés par un réalisateur dont on sent la présence derrière chaque plan du film, les enfants de Baracoa ont beau rejouer plusieurs épisodes marquants de leurs existences, ils ne deviennent jamais, comme cela aurait été souhaitable, les auteurs-réalisateurs de leurs propres vies. Le résultat terrible est que toutes les reconstitutions de Baracoa manquent cruellement de spontanéité et demeurent justement au stade de la simple reconstitution.
Disons-le sans détour : Baracoa est un film charmant mais très raide et dirigiste dans son rapport au réel, et donc malheureusement redondant et rapidement ennuyeux. On ne se permettra pas de douter un instant du caractère magique des caractères et des existences réelles d’Antuán et Leonel, qui sommes-nous de toutes manières pour les juger. En revanche l’enchantement ne survit que très partiellement à sa transposition à l’écran, tant la mise en scène peine à faire le pont entre le spectateur et les personnages.
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