CH.FILM

Loulou Suisse 2019 – 70min.

Critique du film

Dans la tête d’un schizophrène

Clélia Godel
Critique du film: Clélia Godel

Atteint de schizophrénie paranoïde, Nathan Hofstetter filme son quotidien et son entourage dans Loulou, son premier long-métrage documentaire et dernier volet d’un triptyque centré sur le milieu psychiatrique. Un projet intime et authentique aux allures expérimentales.

Diagnostiqué schizophrène paranoïde, Nathan Hofstetter va aujourd’hui beaucoup mieux, même si ce ne fut pas toujours le cas. A l’aide de sa caméra, le jeune réalisateur nous montre son quotidien. Il se place devant et derrière l’objectif, filme son entourage et sa famille. Aux anecdotes personnelles s’ajoutent les réflexions de ses amis et de ses proches de l’hôpital qui cherchent à mettre des mots sur des maux inexplicables. Une manière pour eux et surtout pour lui, de s’affirmer et de grandir.

Composé d’images tournées sur plus de huit ans, Loulou vient terminer un triptyque que Nathan Hofstetter a consacré au milieu psychiatrique. Atteint de schizophrénie, le cinéaste tente dans ce long-métrage de rendre concret des éléments qui semblent imperceptibles. Il l’explique d’ailleurs parfaitement dans une citation dont il s’attribue la paternité : « Les fous sont les explorateurs malchanceux de l’invisible ». Le documentaire se transforme alors en une démarche aux allures presque thérapeutiques et exutoires qui paraissait nécessaire pour le jeune homme.

Une chose est certaine, Nathan Hofstetter aime les images et souhaite avant tout capturer des moments simples, sans aucune fioriture. Les interviews qu’il mène débordent également de spontanéité. On ne peut qu’admirer le naturel dont font preuve les différents protagonistes lorsqu’ils se retrouvent face à la caméra de leur ami. Le long-métrage prend même une tournure particulièrement émouvante quand Nathan Hofstetter évoque sa mère et la filme en train d’entonner un air de Carmen, probablement une des plus belles scènes du film.

Malgré tout, le projet reste extrêmement personnel et il est souvent difficile d’y adhérer entièrement. Le réalisateur a beau capturer ces instants dans lesquels il a ressenti une certaine énergie, on frôle parfois le film expérimental qui manque d’une réelle structure et d’une forme d’homogénéité. En plus de s’éparpiller visuellement, le cinéaste s’attarde parfois longuement sur des détails qui ne semblent faire sens que pour lui, laissant alors le spectateur de côté. De la même manière, des brides de discussions, pourtant intéressantes, auraient mérité qu’on les développe ou tout simplement qu’on les contextualise davantage.

En bref !

Né d’une démarche très personnelle, Loulou propose des moments authentiques et sans filtre dans lesquels Nathan Hofstetter y trouve une forme d’exutoire. Indéniablement honnête, le documentaire peine toutefois à inclure totalement le spectateur qui se retrouve un peu perdu devant les compositions du jeune cinéaste.

17.03.2020

2.5

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