The King of Staten Island Etats-Unis 2020 – 138min.
Critique du film
All Eyez on Me
Après avoir explosé les charts lors de sa sortie en VOD aux États-Unis, «The King of Staten Island» débarque enfin dans les salles romandes. Pete Davidson y incarne un sympathique loser et aspirant tatoueur de Staten Island, une histoire d’un genre coming-of age pour ce trublion de 24 ans endeuillé par le décès de son père.
Il y a 17 ans, un drame emportait le père de Scott (Pete Davidson) dans l’incendie d’un hôtel. Ancien pompier, Scott n’avait que 7 ans et depuis la famille vivote péniblement. Aujourd’hui âgé de 24 ans, Scott s’est convaincu d’être un crétin fini. Un gamin des blocs, un peu drogué, un peu loser, incapable de maintenir une relation, un bon à rien, dit-il, et qui rêve pourtant de devenir tatoueur. Sa petite sœur (Maude Apatow) s’envole pour l’université, Scott se retrouve seul avec sa mère (Marisa Tomei), mais alors qu’elle fait la rencontre d’un pompier divorcé (Bill Burr), la vie de Scott est en proie à quelques changements.
Réalisateur, scénariste et producteur prolifique, faiseur de carrière (Steve Carell, Ben Stiller...) et père notamment de la comédie culte 40 ans, toujours puceau, Judd Apatow, discret en 2015 avec Trainwreck, revient en grande pompe aux côtés d’un Pete Davidson tendre et hilarant. Figure du «Saturday Night Live» depuis 2015, l’acteur de 26 ans y incarne Scott Cartlin dans une comédie aux airs d’autofiction. Touchante transposition du réel, «The King of Staten Island» nous parle du véritable Pete Davidson, de ses troubles du comportement, de ses addictions, et de son père, pompier disparu le 11 septembre 2001.
À fumer de l’herbe dans la cave chez sa mère ou en train de tatouer des mineurs sur les berges de Staten Island, une nonchalance poétique parsème la vie de Scott. Anti-conformiste, ermite, adolescent, dealer, beatnik ou simple crétin, Judd Apatow dresse le doux portrait d’un underdog et ses déboires. Scott, figure de proue d’une existence endeuillée, arpente la vie avec cynisme et une ironie comme ses chemises, jaune et cinglante. Un humour brutal pour se rire de l’absence et conjurer un drame vieux de 17 ans.
Une plaie béante, grande comme le coeur; sa mère s’amourache d’un certain Ray (Bill Burr), pompier lui aussi, et Scott y voit un affront sur l’autel de son père. Sa sœur à l’université, le voilà désormais seul à la barre du naufrage annoncé, la débâcle est touchante. Scott l’apprivoise à la «Je T'aime,...Moi Non Plus», avec violence et suffisance, et dans les entrailles d’un duel illégitime se dessine alors une figure tutélaire, quasi paternelle, à l’aube du pardon.
Face à la ville qui jamais ne dort, les enfants de l’île ont bien grandi. Accompagnée d’un casting flamboyant, The King of Staten Island est une œuvre authentique. Marisa Tomei y refait sa vie avec une justesse incroyable, et Pete Davidson croise le fer avec ses démons dans une volte splendide. Une verve insolente pour dynamiser le folklore de la comédie feel good. Sur le chemin de la sagesse, et jusque dans son happy ending avec l’excellente Bel Powley, le king de Staten Island s’est assagi. Pete Davidson rayonne de tous les plans. Une sincérité se dégage, une bienveillance aussi, «The King of Staten Island» est un baume délicat pour les rêveurs fous du continent.
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Commentaires
“Dans sa peau”
Scott a perdu son père alors qu’il n’était qu’un enfant. Aujourd’hui âgé de 24 ans, il vit toujours chez sa mère et ignore ce qu’il va pouvoir faire de sa vie.
Il n’a pas fière allure le roi de Staten Island. Ce grand dégingandé aux dents saillantes et aux cernes alourdissant ses yeux globuleux ressemblerait à un « panda anorexique ». Son trône vacillant n’est qu’un sofa usé dans le sous-sol miteux de ses potes, cour de bras cassés sans miracles. Sa peau sillonnée de dessins témoigne de ses défaites et illusions passées. Quant à ses rêves, ils s’évanouissent dans les volutes de fumette qu’il dégage et ravale à longueur de journée. Et pourtant, c’est dans ses faiblesses que l’homme se révèle.
Judd Apatow s’appuie sur la personnalité de Pete Davidson pour raconter son histoire. Ce comique américain, prince du stand-up, endosse un rôle qui laisse a priori peu de place à la fiction. Ainsi jongle-t-il avec une certaine grâce entre le drame de sa vie – le décès de son père pompier dans l’attentat du World Trade Center – et un humour grinçant. Les flèches dialoguées se succèdent et s’allongent tout comme le film, sans pour autant nous ennuyer. L’herbe permet de ralentir le rythme de l’existence, prétendent-ils. Si ce clown triste risque d’en éreinter beaucoup, il suffit de le prendre par la main pour qu’il redevienne un enfant sage disposé à élargir son horizon.
7.5/10… Voir plus
Dernière modification il y a 4 ans
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