Tendre et saignant Belgique, France 2020 – 91min.
Critique du film
Rendez-vous manqués
Connu principalement comme acteur, Christopher Thompson s’essaie avec Tendre et Saignant à sa deuxième réalisation. Après le musical Bus Palladium, il reste dans le registre de la comédie dramatique en incorporant à son œuvre une romance, portée par l’attachant duo Géraldine Pailhas et Arnaud Ducret. Mais si le décor, une boucherie de quartier, est original, son histoire l’est bien moins.
Affligée par la mort soudaine de son père, dont elle s’était éloignée grâce à sa carrière de rédactrice en chef d’un magazine de mode, Charly Fleury (Géraldine Pailhas) réalise que le choix de l’orientation de la boucherie familiale lui revient. Alors qu’elle est d’abord décidée à mettre la clef sous la porte, la journaliste est convaincue par son amant d’un soir, Martial Toussaint (Arnaud Ducret), également commis du défunt, d’assurer les ventes au moins jusqu’à la fin de l’année.
Deux personnages, aux vies moins antagonistes qu’ils le laissent croire, débutent une relation amoureuse, qui devient professionnelle suite à un drame les affectant tous deux. Voilà un pitch bien connu, qui promettait pourtant quelques étincelles, notamment grâce aux talents des deux acteurs principaux, l’un habitué des comédies, l’autre déjà à l’affiche du premier film du réalisateur. En effet, Christopher Thompson avait toutes les cartes en main pour confronter les deux âmes déroutées à leurs valeurs et sentiments dans un jeu du chat et de la souris aussi romantique que sanglant durant leur collaboration forcée. L’ouverture promettait d’ailleurs plusieurs dilemmes forts entre l’artisanat boucher, symbole du passé de Charly, mais du futur de Martial et l’hypocrisie des requins de la mode, qui rejettent la rédactrice avant d’appâter son partenaire.
Seulement, le réalisateur et son coscénariste se détournent bien vite des pistes, attendues, mais efficaces, offertes par ces prémices et préfèrent enchaîner sur une dizaine de retournements et péripéties invraisemblables dignes d’un téléfilm mélodramatique. La mise en scène est d’abord à l’image des tourtereaux : maladroite, peinant à susciter l’émotion voulue et en quête d’une identité jusqu’à confondre les destins de l’artiste passionné(e) et de la célébrité en couverture. Ensuite, si elle prête à sourire lorsqu’elle convoque les genres du buddy movie entre deux fermes, l’absurde hivernal ou le western en cuisine, elle manque toutefois de mordant et ne parvient jamais complétement ni à rendre hommage aux artisans ni à critiquer le manque d’intégrité de certains supérieurs.
Finalement, reste une romance mal agencée qui surnage dans un déluge d’autres thèmes trop peu exploités. Car si les choix de carrière respectifs et les liens familiaux de Charly constituaient des obstacles suffisants pour retarder le happy ending, l’ajout de comparses journalistes et autres amants se révèle superflus, d’autant plus qu’aucun n’est pluridimensionnel, à l’image de la collègue opportuniste, interprétée par le second couteau Alison Wheeler. Malgré la déception, retenons la belle alchimie entre les principaux comédiens, quelques envies fugaces du réalisateur et la plongée dans les entrailles méconnues d’une profession dont le sort est encore débattu.
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