Where'd You Go, Bernadette Etats-Unis 2018 – 109min.
Critique du film
Cate Blanchett, architecte existentielle
Cate Blanchett dans la peau d’une architecte un peu délurée, un brin dépressive, pour un long-métrage qui n’exploite pas pleinement son potentiel dramatique et comique.
Femme asociale, ex-architecte et misanthrope, empêtrée dans un malaise notoire. Bernadette Fox (Cate Blanchett) ne côtoie que sa fille Buzz (Emma Nelson) nommée «Bee», son mari Elgie (Billy Crudup), et son assistant virtuel à qui elle dégoise ses problèmes moraux. Enfermée dans son manoir délabré de Seattle, sa vie se résume à se prendre le bec avec ses voisines et les autres parents d’élève du lycée huppé que fréquente sa fille.
Adapté du best-seller de Maria Semple, «Where'd You Go, Bernadette» est un chemin personnel sur le bon sens de la vie. Un deuil professionnel, un besoin de s’extirper d’une ville qui vous a arraché quelque chose d’imprégner en vous. Film au titre trompeur, son appellation se lit surtout à travers le point de vue de la fille adolescente, solidement campée par la néophyte Emma Nelson. La simple explication de la «réactualisation» de matière grise dès l’incipit, nous met rapidement sur la piste d’une absence (surtout) psychologique.
Le réalisateur Richard Linklater pense à l’architecture (mentale) d’une nouvelle vie: Bernadette et son après. Un premier temps happée par sa passion pour l’architecture écologique, elle laisse sa passion de côté après une mésaventure liée à la destruction malheureuse d’un projet qu’elle chérissait. La déception est grande: départ de Los Angeles pour Seattle avec Elgie, entrepreneur qui collabore avec Microsoft sur un projet d’assistance virtuelle.
Certes la dimension de l’isolement est plutôt bien gérée, intéressante quand elle convoque une (légère) métaphore de notre monde surconnecté - l’assistance virtuelle, par exemple. Devenue une artiste prisonnière de son esprit créatif, Bernadette éclipse le petit monde qui l’entoure. Le personnage d’Elgie est presque un faire-valoir au milieu des errances de Bernadette, obligeant le talent de Billy Crudup à rester presque silencieux. En contrepoint, le personnage de Kristen Wiig est savoureux, parfait sous les traits d’une voisine un peu potiche.
C’est bien Cate Blanchett qui tire les marrons du feu. Sûrement l’atout majeur de Where’d you go Bernadette. Dans un registre similaire à Blue Jasmine, ces traits de caractère nerveux, névrosé, si proche d’imploser, l’actrice australienne fait étalage de sa classe - une scène avec Lawrence Fishburne, le mentor de Bernadette, en est le parfait exemple.
Loin d’être indigeste, mais un ton en deçà des dernières œuvres de Richard Linklater, le récit ne trouve jamais l’écho nécessaire. Il ne surprend pas, ne convainc jamais complètement - ce petit goût amer qui persiste. Une œuvre inégale voguant jusqu’au continent le moins accessible pour retrouver une femme qui était là physiquement, mais absente moralement. Là est la subtilité du récit.
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Commentaires
“Nuits blanches à Seattle”
Bernadette ne va pas bien à Seattle. Les angoisses permanentes de cette ancienne architecte à succès inquiètent de plus en plus son époux. Quant à leur fille de 15 ans, Bee, elle ne rêve que d’une expédition en Antarctique.
Tout ne tourne plus très rond dans le monde de Bernadette. Une maison biscornue qui prend l’eau, un jardin à l’abandon qui s’effondre, un mari qui ne la comprend plus, des voisines qui la craignent et la détestent, ainsi qu’une liste de médicaments s’allongeant. Agoraphobe, insomniaque et sans inspiration, l’artiste, qui aurait tout pour être heureuse, ne supporte plus la banalité de son existence. Comment y échapper ?
Dans ce rôle à fleur de peau, mêlant fragilité et extravagance, Cate Blanchett fait à nouveau l’étalage de ses talents multiples. Frôlant la redite, son personnage se rapproche du Jasmin bleu offert par Woody Allen. Mais le scénario n’est pas à la hauteur de sa performance. Multipliant les digressions inutiles – espionnage russe, vol de zodiac et virée inopportune au Pôle Sud –, le film sans rythme et bien trop long lasse en s’enlisant dans l’improbable.
5.5/10
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