Fort du succès de ses précédentes œuvres, le documentariste Daniel Roher s'est associé à des producteurs américains pour offrir un point de vue inédit sur les combats de l'homme politique Alexei «Navalny».
(Un texte initialement publié en allemand, et librement adapté en français par Eleo Billet)
Charme, conviction et humour transparaissent du regard bleuté d’Alexei Navalny, alors qu’il retrace, face à la caméra, les semaines éprouvantes qui ont suivi son empoisonnement dans un avion en août 2020. Bien que le Parti communiste russe soit aujourd’hui le principal opposant au régime de Poutine, c’est Navalny qui connaît la plus grande notoriété hors des frontières de son pays, acquise suite à cet événement tragique.
Ce dernier est d’ailleurs retracé en détails, de ses cris de détresse rediffusés dans le monde entier à son transfert dans un hôpital berlinois, après un atterrissage forcé à Omsk. Mais la bataille pour sa survie s’est poursuivie au-delà de ses jours dans le coma, puisqu’il fallut encore déterminer l’arme du crime, établie plus tard comme étant un agent innervant : le Novitchok. Aujourd’hui, l’homme est encore menacé et a récemment été condamné à plusieurs années de prison.
Réalisateur originaire de Toronto, Daniel Roher était déjà connu et célébré pour son documentaire Once Were Brothers sur le groupe « The Band ». Mais avec son nouveau projet, il a obtenu une occasion unique : celle d’accompagner avec son équipe Alexei Navalny et sa famille pendant plusieurs mois après sa convalescence.
Cet accès privilégié a permis au metteur en scène de coller aux basques de Navalny et de s’immiscer dans sa vie personnelle, pour mieux contraster images d’archives comme d’actualité avec des interviews et ses prises de vues de l’intimité de l’homme et de ses proches. Ce dispositif offre alors une résonance internationale à cet aperçu plus qu’impressionnant des conséquences, souvent fatales, d’être une personne d’opposition à un gouvernement totalitaire.
Une œuvre à la fois captivante et bouleversante...
Aussi, la présence d’une équipe de tournage aux côtés de l’homme politique n’a pu être possible qu’à grand renfort de confiance et de discrétion. Le secret a ainsi entouré le documentaire jusqu’à sa diffusion au Festival de Sundance 2022, où il a remporté deux prix prestigieux. L’un de ces prix, celui du public, est d’ailleurs amplement mérité puisque Navalny est une œuvre à la fois captivante et bouleversante, à la tension si prégnante que l’on pourrait la confondre avec un thriller de fiction.
Les séquences les plus représentatives de ce sentiment sont les rencontres avec Christo Grosew, du réseau d'investigation Bellingcat, qui reproduit avec minutie le déroulement de la tentative de meurtre, et révèle par là même de nombreuses surprises.
Alors que Poutine et la Russie font la Une des journaux depuis plusieurs semaines, et que des expert.es s’évertuent à comprendre les motivations du dirigeant, ce documentaire ne pourrait pas être plus actuel dans sa représentation de la répression des dissident.es par le régime anti-démocratique russe.
Ce documentaire se distingue d’autres sources d’information par son focus sur les émotions humaines, ici celles d’Alexei Navalny, notamment lorsqu’il prend la dangereuse décision de retourner en Russie, envers et contre tous. Mais même si la caméra le suit à la trace, l’homme garde une part d’insaisissable, d’autant qu’il est habitué à se vendre auprès des médias. Néanmoins, en seulement 98 minutes, «Navalny» réussit un tour de force avec sa mise en avant d’un homme inspirant et au courage sans faille.
4,5/5 ★
Depuis le 18 mai au cinéma
_Plus d'informations sur «Navalny»._
Bande-annonce :
La rédaction vous recommande aussi :
Sie müssen sich zuerst einloggen um Kommentare zu verfassen.
Login & Registrierung