Kritik25. September 2018 Sven Papaux
«Un peuple et son roi» - Louis XVI face au chaos populaire
Souvent annoncé comme le film français le plus ambitieux depuis belle lurette, «Un Peuple et son roi» de Pierre Schoeller (L’Exercice de l’État) tente une reconstitution audacieuse de la Révolution française. Un travail titanesque au budget raisonnable de 16,9 millions d’euros (très léger comparé aux productions américaines) et au casting francophone de premier ordre.
1789, un parfum de liberté se propage un peu partout en France. À Versailles, Louis XVI trône dans son palais doré, alors que son peuple végète dans l’obscurité. Une mosaïque de personnages prêts à élever la voix, prêts à couper la tête du Roi pour faire valoir ses droits. Tout simplement demandeurs d’une vie meilleure. Un renversement populaire qui amorce une révolution, le moment choisi par la France pour créer sa République.
Pierre Schoeller axe son récit sur les âmes vaillantes, celles qui renversent le grand Louis. Les volets se ferment et plongent Versailles dans l’obscurité. La brillance et la grandeur que le Roi-Soleil avait mis des années à mettre en place, la voici dorénavant confinée dans un coin du palais. Louis XVI (Laurent Lafitte) déchu, dépassé, dégoûté par le simple fait d’évoquer le mot « souveraineté ». La souveraineté dans la nation, voilà quelque chose qui semble anéantir le Roi. Une nation qui, sous le règne de Louis XIV vivait l’apogée de l’absolutisme.
Des fulgurances jouissives, qui transfigurent un récit historique un peu patraque...
De 1789, 3 mois avant la prise de la Bastille, au 21 janvier 1793, date de la mise à mort du Roi en place publique, Un Peuple et son Roi se construit dans le sang, les cris, les pleurs et la rébellion d’une patrie unie. De la lavandière Françoise (Adèle Haenel), dévastée par la mort de son bébé, au visage défait et résigné d’un roi sur le déclin, les tableaux sont nombreux, c’est bien le problème ! À force de courir derrière plusieurs lièvres, à ériger la France d’antan à travers les différentes classes sociales, Schoeller se perd, perd le fil de son cinéma à vouloir analyser le bourdonnement des classes populaires, ce qui entrave l'analyse du mécanisme de la Révolution.
Néanmoins la dimension historique est soigneusement mise en scène et les figures illustres profitent d’une distribution de choix: Robespierre (Louis Garrel), Henri IV (Patrick Préjean) présent dans une des meilleures séquences du film en plein milieu d’un cauchemar de Louis XVI, ou encore Marat (Denis Lavant) et ses monologues féroces devant l’Assemblée nationale. Des fulgurances jouissives, qui transfigurent un récit historique un peu patraque et relativement ennuyeux. Mais c’est sur le visage de Laurent Lafitte que le film trouve une vraie trame dramatique. L’acteur français, peu présent à l’écran, réussit à nous envoûter dans son costume de roi chancelant, au faciès fermé, à la colère incoercible. Une marmite prête à exploser, là où l’histoire de la France a pris forme grâce à l’abnégation de ses concitoyens. Les choix de Pierre Schoeller ne sont pas toujours des plus judicieux, à commencer par ces chants (inutiles), et l’on regrette le traitement (trop) inégal de la révolution pour un film de cette ampleur.
En bref !
Dans Un Peuple et son roi, l’audace est à souligner, le casting est bon, mais cette fois-ci la prise de risque n’a pas payé. On reste sur notre faim.
Note de la rédaction -> 2,5/5 ★
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