Clifford Canada, Royaume-Uni, Etats-Unis 2020 – 97min.
Critique du film
Pour l’amour d’un chiot rouge
Adapté de la série de livres pour enfants Clifford the Big Red Dog publiés chez Scholastic, ce film familial d’aventure s’est trouvé un bien mauvais réalisateur en la personne de Walt Becker (Alvin et les Chipmunks : À fond la caisse), pour nous embarquer dans une fade histoire d’amitié entre un grand chien rouge en CGI et sa propriétaire en prises de vues réelles.
Alors qu’Emily Howard (Darby Camp) est temporairement gardée par Casey (Jack Whitehall), son oncle irresponsable, elle parvient à lui faire accepter un minuscule chien rouge, offert par M. Bridwell (John Cleese), un forain malicieux. Baptisé Clifford, le chiot se révèle magique et grandit de plusieurs mètres en une nuit, devenant impossible à cacher. Ce faisant, il va attirer les convoitises de Zack Tieran (Tony Hale) directeur de l’entreprise en génétique Lyfegro. S’engage alors pour la jeune fille un combat inégal, à moins qu’elle ne trouve des alliés dans toute la ville.
Prenez n’importe quel film de chien récent et ajoutez-y le coming-of-age d’une préadolescente harcelée, un parent qui doit s’accomplir en lui apportant son aide et les expérimentations farfelues d'un antagoniste caricatural, vous obtiendrez ainsi Clifford, un divertissement sans grande ambition. Encore serait-il plaisant s’il ne gâchait pas son potentiel émotionnel et comique en ne développant ses personnages qu’au minimum. En effet, l'héroïne est d’abord caractérisée comme étant une collégienne solitaire, sans soutien même de la part de son ami Owen et qui masque sa peine derrière une trop grande maturité. Mais passée l’introduction et sa relation déséquilibrée avec sa mère (Sienna Guillory), elle redevient une fillette naïve, tête brûlée jusqu’à l’insupportable par ses décisions et le mauvais jeu de l’actrice. D’ailleurs, l’arc narratif principal lui est volé par son oncle, qui sur-explique chacun de ses tourments avant de se décider à écouter sa nièce et dont la happy end est qu’il se conforme à une vie rangée en se trouvant un travail, une conclusion très éloignée du merveilleux promis par le magicien en ouverture.
Bien qu’adapté pour les enfants par son ton et l’édulcoration de ses enjeux, le long-métrage aurait gagné en profondeur s’il avait exploré tous ses thèmes. D’une part, les conséquences et les façons de contrer le harcèlement, plutôt que de le résoudre par la seule présence de Clifford. D’autre part, l’antispécisme auquel s’oppose Lyfegro, puisque son seul but est de créer les animaux les plus nutritifs possibles et qui veut détenir Clifford pour l’exploiter. Une confrontation entre ultra-capitalisme et sentiments qui aurait rappelé Okja de Bong Joon-ho, si Zack Tieran avait eu un soupçon de l’aura de Lucy Mirando (Tilda Swinton).
Il ne faut pas non plus s’attendre à une mise en scène artistique ni même aboutie puisqu’elle peine souvent à intégrer Clifford dans l’environnement. Aussi, hors de l’appartement des Howard, où la menace d’en être expulsé est un conflit traité avec autant d’humour que de drame, plus aucune surprise ne nous accueille dans les rues de New York. Alors que l’augmentation soudaine de taille et de poids de Clifford amène un contraste amusant dans l’exploration d’une même pièce, peu de réflexions accompagnent ensuite les courses-poursuites, sans doute parce que les créateurs se sont limités à une hauteur de 3 mètres, empêchant tout travail du gigantisme. Néanmoins, on peut accorder au film le bénéfice de ne jamais ennuyer et d’accompagner ses personnages oubliables de péripéties jamais désagréables à suivre. Reste à souhaiter que la suite déjà annoncée apprenne des erreurs du premier.
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