Elle Belgique, France, Allemagne 2016 – 130min.

Critique du film

Elle

Critique du film: Geoffrey Crété

Divorcée, indépendante, autoritaire, Michèle voit sa vie basculer lorsqu’un inconnu l’agresse et la viole chez elle. Cette intimidante business woman, à la tête d’une entreprise de jeux vidéo, va tenter de retrouver cet homme, qui continue à la poursuivre de loin. Alors qu’un étrange jeu s’installe entre eux, Michèle va peu à peu glisser vers des territoires dangereux…

Il fallait au moins un scénario qui repousse les frontières de la morale et bouscule le conformisme pour que Paul Verhoeven ressorte de ses Pays-Bas, plus de quinze ans après avoir quitté Hollywood, pour réaliser un thriller en France. Adapté du livre Oh... de Philippe Djian, présenté en compétition officielle au Festival de Cannes, Elle est donc un thriller imprévisible, inattendu, indéfinissable, qui résiste à toutes les formules – le revenge movie, le mélodrame, le thriller bas de gamme. Sur la corde raide, le cinéaste furieux de Basic Instinct, Starship Troopers ou encore Showgirls, manie et mélange l’humour et la peur, la légèreté et la violence, mené par un instinct noir fascinant. Trop souvent laissée en pilotage automatique, Isabelle Huppert s’y montre absolument fantastique, d’une folie et d’une fougue inouïes. Improbable, son association avec le réalisateur néerlandais est sans conteste l'un des grands moments de cinéma de 2016 ; un moment qui se dérobe aux lectures les plus attendues pour explorer les territoires sombres de l'âme humaine, et ainsi hanter le spectateur, pris de court.

05.06.2024

4

Votre note

Commentaires

Vous devez vous identifier pour déposer vos commentaires.

Login & Enregistrement

CineFiliK

il y a 5 ans

Pensée du jour : Jeu, tue, hell

Marquée à jamais par un lourd passé, Michèle est devenue un roc dans sa vie personnelle et professionnelle. Le jour où un inconnu fait irruption dans sa belle maison et la viole avant de fuir, elle refuse de se laisser abattre, fait face et prend les choses… en main.

« Des uramakis… Oui, deux pièces. » Au lieu d’appeler la police, Michèle commande des sushis par téléphone, peu de temps après avoir été agressée. Le déni ? La honte ? L’indifférence ? Rien n’est si limpide en elle. La nature trouble du personnage se dévoile petit à petit, éclairée par ceux qui gravitent autour de cette femme à poigne, les hommes de sa vie notamment : son père, son ex-mari, son amant, son fils, ses employés, son voisin… Michèle se révèle à la fois victime, jalouse, dominatrice, protectrice, directrice et soumise. Un caractère multiple qui l’entraîne dans un jeu sadomasochiste risqué au point de pactiser avec le diable lors d’une descente aux enfers symbolisée. Mais comme le confirme Richard, son époux : « La plus dangereuse, Michèle, c’est tout de même toi. »

On raconte que le scénario était trop pervers pour le cinéma américain, d’où un tournage et un casting français. Dans le rôle-titre, la reine Isabelle est d’une classe effrayante. Qui d’autre pour alterner banalités quotidiennes et horreurs orales avec tant d’élégance et de maintien ? Quelle autre actrice peut être réduite au pire tout en dégageant cette force glaçante ? Il n’y a qu’elle. Le reste de la distribution n’en est pas moins intéressante. Calés dans des figures caricaturées à l’extrême, ils apportent leur pierre à l’édifice. Les yeux de Laurent Lafitte n’auront jamais été aussi ensorceleurs, quant à la blanche Virginie Efira – comédienne à la hauteur –, une seule réplique lui suffit pour ouvrir une autre dimension. D’où l’intérêt d’un regard étranger posé sur eux tous.

De retour derrière la caméra après dix ans de silence, le Hollandais violent, Paul Verhoeven. Autant affirmer que l’approche sexuelle et distordue de la nature humaine définissant cet agent provocateur avait manqué. Qui d’autre, dans un jonglage efficace des plus pernicieux, pour désamorcer avec l’incongruité d’un humour très noir le malaise insidieux qu’il sait répandre ? Qui d’autre pour réussir ainsi l’exploit d’échapper à une obscénité totalement complaisante ? Il n’y a que… lui.

8.5/10Voir plus

Dernière modification il y a 5 ans


frederic_chevallay

il y a 8 ans

Comment dire...c'est effectivement un grand film... abordant une thématique dramatique, à savoir celle d'un viol, à propos duquel Isabelle Huppert y campe une femme au paraître froid et désabusé, tout en découvrant un être des plus sensibles et meurtri par une enfance gâchée..


commundmortels

il y a 8 ans

Bon thriller français. On reconnaît la patte de l'auteur (P. Djian) et son obsession pour les quasi huis clos. Superbe. Alors que j'adore pas Isabelle Huppert, ni Laurent Lafitte. C'est d'ailleurs pour ce casting que je ne mets pas la 6ème étoile...


Autres critiques de films

Gladiator II

Red One

Venom: The Last Dance

Emilia Pérez