Le redoutable France, Myanmar 2017 – 107min.

Critique du film

Le redoutable

Critique du film: Geoffrey Crété

Paris, 1967. Fasciné et emporté par le vent de révolution qui soulève notamment la France, Jean-Luc Godard, le cinéaste le plus en vue de sa génération, a tourné La Chinoise, un film sur Mao Zedong et le communisme. Il y a rencontré Anne Wiazemsky, de 20 ans sa cadette, et depuis ils sont en couple. Mais La Chinoise est très mal reçu par la critique, et alors que mai 68 bouleverse son pays, Godard traverse une crise profonde.

Auréolé d’un Oscar du meilleur réalisateur et d’un succès phénoménal avec The Artist en 2011, Michel Hazanavicius a essuyé un sévère échec avec The Search, en 2014. Enchaîner avec un faux biopic sur Jean-Luc Godard est tout sauf un pari facile, et c’est certainement pour ça qu’il est si beau. Moins intéressé par l’idée de raconter la vie du grand cinéaste que de filmer ce personnage hors-normes avec humour, légèreté et dérision, il compose une comédie décalée et aérienne. Utilisant dans la forme les armes de Godard (un jeu réjouissant sur les couleurs, les cadrages, les voix-off, avec une foule de clins d’œil), il dessine avec Le Redoutable un double portrait : du réalisateur du Mépris et Pierrot le fou, et de mai 68, époque révolutionnaire. Le parallèle entre les deux est touchant, déconcertant, tragique. Refusant de faire une hagiographie, il fait de Godard un personnage absurde, tour à tour pathétique et hilarant, mais désespérément touchant.

03.04.2024

4

Votre note

Commentaires

Vous devez vous identifier pour déposer vos commentaires.

Login & Enregistrement

seemleo

il y a 7 ans

Michel Hazanavicius non seulement se passionne pour le cinéma, mais est aussi un réalisateur surdoué qui doit en avoir encore sous la pédale, réalisant une carrière en dents de scie de par ses choix éclectiques et libres. L'idée de portraitiser un cinéaste comme Godard est un effet miroir;
Hazanavicius est inspiré par Godard. Il lui ressemble certainement par certains aspects. Il sait donc de quoi il parle.

Quoiqu'il en soit, Jean-Luc prend vie devant nos yeux, parfaitement incarné sous les traits de Louis Garrel. Le portrait psychologique que nous découvrons en le suivant, au travers des yeux de sa jeune femme, durant ces quelques mois de 1968 est passionnant et permet de comprendre sa nature sans compromis et obsessionnel. Le réalisateur le décrit lui aussi imperturbable dans ses idées, mais avec humour, finesse, et clins d’œil. Dépeint de manière peu flatteur, notre helvète se meut en autiste incompris, obnubilé par ses propres réflexions. Il apparaît également comme un être sans défense, vite dépourvu, qui s'excuse souvent après s'être emporté.

En suivant ainsi ce redoutable, on comprend mieux sa démarche artistique ainsi que son futur parcours en tant qu'OVNI du 7ème art remettant en permanence en cause son travail pour se réinventer à chaque fois.

Le film est drôle, intelligent, bien joué. On ne s'ennuie jamais.Voir plus


CineFiliK

il y a 7 ans Excellent

“Hommes à lunettes”

En 1967, le fameux cinéaste Jean-Luc Godard et Anne Wiazemsky, l’une de ses actrices fétiches, s’aiment. Mais la montée de la contestation estudiantine qui explosera quelques mois plus tard va compromettre leur couple.

Jeunesse, Légende, Génie. J.-L. G. Homme, artiste, militant. Trois casquettes et quelques épaisses montures pour masquer cette multiple figure. Cet insatisfait qui doute et ne cesse de se remettre en question. Godard se déclare mort, vive Godard ! Le héros est redoutable, insubmersible, insaisissable. Par définition, la révolution est le mouvement d’un objet autour d’un axe, le ramenant finalement au point de départ. Conscient de ne jamais pouvoir atteindre sa cible, Hazanavicius l’élude par l’idée même du pastiche. C’est là la force, l’intelligence et la limite de son hommage. Il gagne en rire et accessibilité, ce qu’il perd en vérité. Dans le rôle, Louis Garrel se fond tout en restant reconnaissable. Le digne héritier de la Nouvelle Vague zozote avec insistance, mais démarque son talent en jouant la carte de l’autodérision. Ainsi, les acteurs ne seraient pas que des « cons » qui répètent ce qu’on leur demande de dire. La mise en abyme est installée et son effet miroir reflète aussi à l’homme à lunettes qui se dissimule derrière la caméra.

7/10Voir plus

Dernière modification il y a 7 ans


Autres critiques de films

Gladiator II

Red One

Venom: The Last Dance

Le Robot Sauvage