CH.FILM

Wonderful Losers Belgique, Italie, Lettonie, Lituanie, Suisse 2017 – 71min.

Critique du film

La face cachée du succès collectif

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Wonderful Losers s’intéresse à ces hommes de l’ombre, ces bosseurs qui ne comptent pas leurs efforts pour faire gagner leur leader. Durant 1h10, il est question de la difficulté de remplir ce rôle ingrat, à l’écart des caméras et de la lumière qui va avec. Le devoir de tout donner pour son coéquipier plus chevronné et mettre de côté ses ambitions personnelles. La dure loi du sport.

Samuel Jouy s’était intéressé à ces travailleurs de l’ombre avec Sparring. Steve Landry (Mathieu Kassovitz) était le sparring-partner d’un boxeur en pleine ascension. En somme il prenait les coups sans broncher pour entraîner son illustre coéquipier. Dans Wonderful Losers, il n’est pas question d’essuyer les coups physiques, mais plutôt psychiques. Arunas Matelis braque sa caméra sur plusieurs coureurs du peloton cycliste professionnel pour comprendre le rôle compliqué d’un gregario. Vous voyez la pointe émergée de l’iceberg (ou de la course), avec ces coureurs qui lèvent les bras à l’arrivée, mais derrière la victoire, une vraie stratégie d’équipe est élaborée, où de nombreux équipiers se mettent à la planche pour amener dans les meilleures conditions possibles le leader d’équipe désigné au briefing d’avant course. Des équipiers qui pédalent pour un seul et unique homme.

Les attentes sont élevées pour les leaders, tout comme pour les gregarios. Ces équipiers au rôle ingrat doivent eux aussi être au top continuellement. Sauf que pour eux, la gloire n’est pas au rendez-vous. En suivant des coureurs comme Paolo Tiralongo, furieux pédaleur et équipier dévoué, enfin couronné par un succès de prestige sur son tour national, ou encore Svein Tuft, un infatigable rouleur au solide mental, prêt à se donner corps et âme pour son leader, Wonderful Losers brosse le portrait des durs du vélo. Le cyclisme est un sport exigeant, étudié par une mise en scène au plus près de la réalité des coureurs. Des hommes marqués dans leur chair par les nombreuses chutes. Un voyage dans le monde du sport, précisément celui du cyclisme et ses règles strictes.

Arunas Matelis ne calibre pas exclusivement son film sur les équipiers, son intérêt se porte également sur la force mentale des coureurs professionnels. Même si le cycliste est à terre, l’épaule écorchée et ensanglantée, rien ne l’arrête pour empoigner sa machine et repartir à l’assaut du bitume. Bien loin des numéros de comédien d’un footballeur…Des gladiateurs sur vélo, dopés à l’adrénaline et à la passion, comme le prouve Daniele Colli. Le cycliste italien a voué sa carrière à servir ses leaders, un véritable passionné par son sport, son histoire et surtout le comportement à adopter en tant que cycliste. Ces « magnifiques perdants » ont un côté très humble face au succès, parfaitement retranscrit à l’écran par Matelis. La ténacité et la violence d’un sport comme le vélo rappelle que le sport professionnel n’est pas une simple partie de plaisir.

Les visages marqués, les chutes, les cris de douleur, Wonderful Losers traite de manière un peu légère, mais efficace les coulisses du sport cycliste. Si beaucoup pensent que le cyclisme est un sport individuel et se résume à appuyer sur les pédales le plus fort possible, le documentaire signé Arunas Matelis vous amène quelques éléments de réponse sur la question.

En bref ! Derrière le succès d’un seul homme, il se cache souvent une équipe. Wonderful Losers rend hommage à ces hommes de l’ombre et inconnus du grand public pour faire briller les autres.

05.10.2018

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