Qui a tué Lady Winsley Belgique, France, Turquie 2018 – 100min.

Critique du film

Un polar en demi-teinte

Clélia Godel
Critique du film: Clélia Godel

Lady Winsley, une romancière américaine, est retrouvée morte dans son manoir sur une petite île turque. Incapable de trouver le coupable, la police locale demande des renforts à Istanbul qui lui envoie l’énigmatique inspecteur Fergan (Mehmet Kurtulus). Expérimenté et déterminé, ce dernier devra user de méthodes contestées par les habitants de l’île pour mener à bien son enquête. Mais très vite, son mystérieux passé va refaire surface, tandis que de nombreux secrets vont éclater au grand jour, bouleversant ainsi le quotidien de l’île.

Tous les regards se posant sur lui : l’inspecteur Fergan n’est pas le bienvenu sur cette île. Et pourtant, grâce à sa fine intuition, il s’avère bien plus compétent que les policiers locaux, déboussolés face au meurtre de cette romancière américaine. Le réalisateur n’hésite d’ailleurs pas à les ridiculiser, en témoignent des situations absurdes, comme celle où le chef décide de coffrer un suspect car son ADN correspond presque à celui du tueur. Un humour léger, bienvenu et qui contraste avec l’ambiance pesante du ciel hivernal de l’île.

Il est néanmoins difficile pour le spectateur de se sentir réellement impliqué dans la recherche du coupable tant l’inspecteur Fergan garde pour lui ses moindres émotions. Par son jeu ténébreux et stoïque, Mehmet Kurtulus reste en effet trop impassible pour nous provoquer un semblant d’attachement. Seul le moment où son passé ressurgit donne un peu d’ampleur au personnage, même si le rapprochement qui se fait alors avec l’enquête paraît quelque peu artificiel.

Si on la pensait être au cœur du film, l’intrigue policière s’efface pourtant rapidement pour laisser place à des thématiques plus sensibles (la question de l’adultère ou les relations entre les sociétés turques et kurdes), sans pour autant les développer adéquatement. Le nombre de personnages secondaires étant relativement élevé, ils peinent à exister convenablement et empêchent une bonne gestion de ces sujets pourtant extrêmement pertinents dans le contexte choisi par Hiner Saleem. On en vient à penser que le cinéaste aurait pu transmettre ses intentions dans un autre genre, comme le drame par exemple, plutôt que de les insérer dans une enquête policière où l’intérêt premier reste la découverte du coupable. Le spectateur se focalisant principalement sur cet aspect, il en vient à passer à côté de l’essentiel et se contente d’un polar en demi-teinte.

En bref !

À trop vouloir en faire, Hiner Saleem ne parvient pas à gérer l’ensemble de ses thématiques qui se perdent dans les trop nombreux personnages secondaires et dans le sous-développement du récit. Le réalisateur ne propose à la place qu’une intrigue policière quelconque qui manque de piment, en plus d’être menée par un inspecteur peu charismatique.

09.09.2024

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 5 ans

“Têtes de Turcs”

Sur la petite île de Büyükada, Lady Winsley, une écrivaine américaine, est retrouvée assassinée. C’est l’inspecteur Fergan, venu d’Istanbul, qui est chargé de l’enquête.

Cheveux gominés, regard sombre et imper impec’ au col relevé, Fergan s’est échappé d’un film noir. Il a pour lui du flair et des méthodes innovantes en ce territoire retiré. De quoi déstabiliser une police locale dépassée, plus encline à la brutalité et aux accusations approximatives. Mais pas facile de faire parler l’ADN quand l’ensemble de la communauté est apparenté.

Des portraits peinturlurés, souriant le couteau entre les dents, défilent sur le générique initial. Un mélange annonciateur de grotesque et d’inquiétant. En dépit d’une dimension politico-sociale qui devrait quelque peu déplaire à Erdogan, l’œuvre manque de panache. On espérait une farce mordante, un crescendo dans l’angoisse et une résolution plus subtile. Peut-être au prochain crime.

5.5/10Voir plus

Dernière modification il y a 5 ans


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