Camille France 2019 – 90min.

Critique du film

Camille Lepage, la guerre dans le sang

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

L’histoire vraie de Camille Lepage, photojournaliste au courage XXL, a de quoi vous serrer le cœur. Boris Lojkine met en scène une immersion sanglante, violente, au milieu d’une guerre civile à la violence inhumaine.

À travers ses photos, Camille Lepage (Nina Meurisse) révèle l’ampleur d’une guerre civile oubliée, celle faisant rage en Centrafrique. En s’associant avec les anti-balaka, les chrétiens qui combattent les musulmans, la photographe réussit à publier des photos qui permettent une vision cauchemardesque de l’état du pays. Publiées dans Libération, ces photos auront un impact professionnel et surtout personnel pour la jeune femme. Un destin fauché par la furie de la guerre.

Elle était idéaliste, jeune, pleine de vie, avec un goût du risque multiplié par 10. Camille Lepage n’avait pas froid aux yeux. L’appareil à la main, elle a sillonné un pays scindé en deux. Le conflit fait rage entre les anti-balaka et les Séléka. Courageuse qu’elle est, son tempérament va la mener au centre de la guerre, aidée par ses alliés anti-balaka. Camille - le film - reprend une fraction de sa vie, un instant qui va la projeter dans un tout autre état d’esprit, loin de l’ignorance - ou de la sourde oreille - des pays occidentaux. La violence y est exacerbée, crue, servant une histoire qui vous retourne les entrailles. Boris Lojkine fait montre d’une précision chirurgicale. Camille est sincère, profond, se lit à travers des faciès entamés, les yeux rougis.

Entre les scènes fictives, se glissent les vrais clichés de Camille Lepage. Une tristesse mélangée à l’action sanglante: des corps allongés et lacérés, se greffant à des visages révoltés, scandant leur rébellion. Un mélange d’humanité et de violence inhumaine. Camille Lepage en fait une affaire personnelle avant un devoir professionnel. Sa passion pour ce pan de pays, pour cette jeunesse empêtrée dans la tourmente politique et religieuse la fascine. Alors quand on lui propose de couvrir, pour Libération, les conflits en Ukraine, la jeune femme se dérobe, reste mutique: sa raison de vivre se trouve là-bas. Son passage en France la rend un peu plus triste, loin des conflits armés ou de l’intensité du combat perpétuel. Les pays occidentaux se prélassent dans leur confort. Une séquence en boîte de nuit vient asseoir son décalage avec ses amis, les gens qui l’entourent. Elle préfère partir au front, l’objectif sur le dos. L’idéaliste s’est battue, avant de courber l’échine. À force de photographier la mort, elle vous étreint. Boris Lojkine lui rend hommage en confectionnant un métrage intense, immersif de bout en bout. Un récit coup de poing!

En bref!

Dans la peau de Camille Lepage, Nina Meurisse réussit une belle prestation, à la hauteur du travail de Boris Lojkine. Un destin tragique, habité par une profonde tristesse, d’une hyperviolence parfois rude à digérer. Dans un genre moins esthétisant et tape-à-l'œil que Beasts of No Nation de Cary Fukunaga, Camille évoque frontalement le destin d’une photojournaliste passionnée, emprunte d’une humilité à toutes épreuves. Mais la guerre aura le dernier mot. Elle détruit tout sur son passage.

30.08.2019

4

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