Jeanne France 2019 – 133min.
Critique du film
Jeanne, enfant erratique, tu mérites mieux
En course dans la section Un certain regard au dernier Festival de Cannes, Bruno Dumont revient à Jeanne d’Arc, après son Jeannette, sorte de fable rock sur l’une des héroïnes françaises. La Pucelle d’Orléans vue par Dumont, à l’aide d’un texte du (grand) Charles Peguy. Les 137 minutes ont quelque chose d’indigeste.
Année 1429. La Guerre de Cent Ans fait rage. Jeanne, investie d’une mission guerrière et spirituelle, délivre la ville d’Orléans et remet le Dauphin sur le trône de France. Elle repart au front, livrer bataille à Paris, lieu où elle subit sa première défaite. Emprisonnée et livrée aux Anglais, s’ouvre alors son procès à Rouen. Une jeune fille au visage enfantin, face à la fureur des hommes. Réfutant les accusations de sorcellerie, Jeanne se verra condamnée au bûcher.
La mort pour la Pucelle d’Orléans, pour hérésie. Qu’on la brûle! Avant Jeanne, Jeannette (2017) était dansant, comme ce moment fantasque tout droit sorti d’un fantasme de Bruno Dumont. Cette fois-ci, c’est sous un autre angle que Dumont dépoussière le mythe Jeanne D’Arc, dans un élan bien plus austère, plus théâtral, mais exaspérant à la longue. Une grosse pointe d’audace, une excellente performance signée par Lise Leplat Prudhomme, l’une des seules exceptions à ce supplice, est c’est tout. Un «biopic» étrange, affreusement long, pas drôle, affligeant quand ces acteurs non-professionnels se lancent dans de longs monologues mâchés et même ratés. La différence se fait rapidement sentir quand Fabrice Luchini, dans la peau du Roi Charles VII, intervient pour marquer la différence entre un acteur aguerri et un amateur. Le contraste est saisissant.
Dumont cherche à évoquer de manière contemplative l’histoire de la guerrière. Un parti pris qui passe même par des idées étonnantes, comme celle d’inviter Christophe, le chanteur et interprète à la voix tremblante, si fragile comme l’est Jeanne. Un chant de rébellion, de défaite face à l’esprit borné et l’incompréhension des hommes. L’immense architecture d’une église où se joue le destin de l’enfant erratique, minuscule au milieu de l’édifice, où résonnent les paroles élégiaques de Christophe. Un récit opaque, qui s’étire pour capter la complexité et la spiritualité d’un personnage tel que Jeanne D’Arc. Troublant, tout en retrouvant sa sobriété de jadis, Bruno Dumont ne convainc pas, nous entraîne davantage dans les failles de son œuvre que celles d’une âme guidée par des voix. Enfant erratique qu’elle est, son histoire n’a pas trouvé l’écho suffisant pour briller.En bref!
Ma Loute était si jouissif, si décalé, si provocant. L’auteur du P’tit Quinquin renoue avec son genre d’antan, tout en perdant de son mordant. Une œuvre qui paraît dissimuler un amateurisme avoué, tout en jonglant maladroitement avec la dimension spirituelle et l’ampleur dramatique de l’histoire de Jeanne D’Arc. Un récit filandreux, au langage bien diffus.
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