The Lighthouse Canada, Etats-Unis 2019 – 109min.
Critique du film
La mouette, c’est pas chouette
Sensation très remarquée à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes pour son casting réunissant Robert Pattinson et Willem Dafoe et pour son dispositif maniériste, The Lighthouse est un étrange objet qui a éveillé de nombreuses curiosités, et même quelques enthousiasmes, le film étant réalisé par Robert Eggers auquel on devait déjà l’excellent film d’horreur The Witch. Paradoxalement, le film est à la fois trop arty et trop gentil.
Noir et blanc hyper contrasté, ratio de cadre plus vertical tu meurs, filmé en pellicule avec des objectifs datant des années 20 et histoire horrifique adaptée d’une nouvelle inachevée d’Edgar Allan Poe : pas de doute, sur le papier la démarche de The Lighthouse est extrêmement excitante, car elle réveille des fantômes d’un passé cinématographique qu’on pensait perdus à jamais. Robert Eggers répond à une question particulièrement prenante : que donnerait un Häxan, ou un Cabinet du Dr Caligari avec 100 ans de savoir-faire accumulé et une maturation totale du genre de l’horreur, dont les deux films susnommés en sont les premiers balbutiements ?
Réponse décevante : une oeuvre peu habitée qui se laisse trop porter par ses qualités essentielles. Le constat met du temps à se faire mais il s’impose assez clairement, si l’ambiance est dantesque et si les prestations ahuries de Willem Dafoe et Robert Pattinson sont excellentes, ce sont de trop fragiles béquilles pour un The Lighthouse méchamment empêché par... son manque de folie. The Lighthouse a beaucoup d’attraits, mais il ne dévisse beaucoup trop peu et jamais complètement.
Malgré un plan final saisissant, un insert répondant aux nombreuses questions mécaniques et gynécologique que posaient La Forme de l’Eau, ou une scène brutale mais très pédagogique sur l’anatomie des mouettes, l’infernale nuit de Walpurgis de Häxan peut dormir tranquille : l’hommage papier glacé est beaucoup trop poli pour prétendre à une quelconque radicalité, et aussi exhubérant qu’une statue de cire de Murnau sur le plateau de Faust mais à laquelle on aurait mis deux chaussettes différentes.
Malheureusement, ce manque d’emportement se combine à un rythme lancinant et répétitif dont le venin cesse d’agir au bout d’une heure de film environ, et c’est en traînant la patte et avec une pointe d’ennui qu’on aborde le dernier tiers du film, une fois acquis qu’il ne sera jamais violemment baroque, juste partiellement foufou. Ne reste que la double certitude que cela valait le coup d’oeil certes, mais aussi que s’il avait été en couleur et sans Robert Pattinson, personne ne se serait attardé.En bref!
Très alléchante sur le papier, la spirale de The Lighthouse ne creuse pourtant pas bien profondément, et se retrouve à tourner en rond. Dommage, ç’aurait vraiment pu être éblouissant, mais l’intérêt n’est pas beaucoup plus qu’archéologique.
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Commentaires
“Avis de tempête”
Dans les années 1890, le jeune Ephraim devient gardien de phare. Pendant 4 semaines, il devra faire équipe avec Thomas, un vieux loup de mer qui pourrait cacher quelques secrets.
On avait aimé The Witch, le premier film de Robert Eggers, qui jouait subtilement sur la paranoïa ambiante du 17e siècle et les accusations de sorcellerie. Un phare perdu au milieu de l’océan semblait figurer le cadre idéal pour une nouvelle expérience horrifique : le huis-clos, la tempête, la hantise des légendes et autres monstres marins. Hélas, le réalisateur n’en fait pas grand-chose, laissant ses deux personnages gesticuler entre les quelques lignes de scénario abandonnées. Cadre atrophié, noir et blanc, musique dissonante plombent le tout. L’hommage à l’expressionnisme allemand aurait pu séduire, mais au lieu d’accentuer l’angoisse et la peur, il mène à l’ennui. La tempête annoncée se meurt dans un verre d’eau.
5/10… Voir plus
Dernière modification il y a 4 ans
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