The Perfect Candidate Allemagne, Arabie Saoudite 2019 – 101min.
Critique du film
Quand élection rime avec émancipation
En 2013, la réalisatrice saoudienne Haifaa Al-Mansour avait marqué les esprits en réalisant Wadjda, le premier long-métrage mis en scène par une femme et tourné entièrement en Arabie saoudite. Poursuivant sa volonté de mettre en avant les avancées de son pays natal, la cinéaste dresse, avec The Perfect Candidate, le portrait d’une jeune femme qui va oser se présenter aux élections municipales de sa ville.
Maryam est médecin et travaille dans l’hôpital d’une petite ville en Arabie saoudite. Un jour, alors qu’elle veut se rendre à une conférence médicale à Riyad, elle est stoppée à l’aéroport car son autorisation de voyage est échue. Elle se rend chez un cousin de la famille pour lui demander son aide et, par un incroyable concours de circonstances, elle se retrouve à postuler pour les élections municipales: cela tombe bien, la voie d’accès devant l’hôpital a besoin d’être bitumée et Maryam veut en faire son combat.
Des changements majeurs sont en train de se produire en Arabie saoudite. Si pendant longtemps, il était difficilement imaginable qu’un assouplissement des règles en vigueur puisse avoir lieu, le pays est aujourd’hui tourné vers l’avenir. Certes, la route reste encore longue et semée d’embûches, mais en réalisant ce film, Haifaa Al-Mansour a voulu contribuer à cet élan positif en racontant l’histoire de cette émancipation féminine.
Maryam (Mila Al Zahrani) incarne cette nouvelle génération qui, tout en ayant un profond respect pour la culture et les traditions saoudiennes, ose saisir l’opportunité qui se dresse face à elle de rendre le monde meilleur. La jeune femme le dit elle-même: elle se bat dans l’intérêt de tous, notamment pour améliorer l’entrée de l’hôpital qui permettrait de soigner les gens plus rapidement. Elle souhaite que l’on s’intéresse à elle pour ses idées, et non pas parce qu’elle est une femme.
Pourtant, la tâche sera loin d’être évidente (comment convaincre des électeurs masculins quand vous ne pouvez même pas être dans la même pièce qu’eux?) et il lui faudra beaucoup de courage pour affronter les nombreux obstacles qui se dresseront sur son passage. Mais elle pourra compter sur l’appui de ses sœurs qui, bien que redoutant les commérages du voisinage, l’aideront dans l’organisation de sa campagne électorale.
La cinéaste a ainsi choisi de filmer au plus près ses comédiennes en montrant notamment les moments privés, dans leur maison, où les voiles tombent et où elles peuvent révéler leur vraie identité. En parallèle et pour évoquer brièvement l’art saoudien, on suit la tournée du père musicien qui surveille les aventures de sa fille de loin, même si ces apartés, en plus de tourner un peu en rond, ne valent pas les rebondissements du parcours de Maryam.
Lumineuse d’un bout à l’autre, l’actrice Mila Al Zahrani nous emporte justement avec son énergie et sa détermination. L’issue du long-métrage ne sera guère surprenante, mais le message plein d’espoir véhiculé par sa réalisatrice et le projet en lui-même, mérite certainement toute notre attention.
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Commentaires
“Quoi de neuf docteure ?”
Médecin dans une clinique modeste, Maryam est fatiguée d’être déconsidérée en tant que femme par ses patients, ses chefs et la communauté en général. Suite à un concours de circonstances, elle se porte candidate aux élections municipales. L’occasion de faire enfin entendre sa voix.
Quoi de neuf sous le ciel brûlant d’Arabie ? Alors qu’en 2012, la morale interdisait à la fillette Wadjda de monter sur un vélo, on retrouve aujourd’hui Maryam seule au volant d’une confortable voiture bleue. Cependant, il lui faut toujours l’autorisation d’un tuteur mâle pour pouvoir quitter le pays, le temps d’un week-end. Puis, c’est le visage entièrement couvert qu’elle apparaît dans sa première vidéo de campagne. Plus tard, un défilé de niqabs attire l’attention : les rares couleurs ou froufrous égayant la noirceur du tissu ont l’apparat de victoires modestes et audacieuses. Quant aux hommes, ils se montrent aussi capables de s’excuser et de verser une larme.
En dépit de quelques élans naïfs, le film nous initie avec entrain. Il dessine un parallèle évocateur entre l’émancipation féminine et la musique, le chant ou l’art en général, appréciés encore avec méfiance. Cette fois-ci pourtant, la première réalisatrice du pays n’a pas eu à cacher sa caméra pour raconter son histoire. Ainsi, la société saoudienne semble évoluer aussi vite que possible, mais aussi lentement que nécessaire.
7/10… Voir plus
Dernière modification il y a 4 ans
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