Zaï zaï zaï zaï France 2020 – 82min.
Critique du film
Le délice de l’absurde
Sélection Officielle de l'Alpe d'Huez 2021, l’adaptation de la bande dessinée de Fabcaro est une folle et rafraichissante comédie aux saveurs d’excentricité. Et dans ce monde parallèle fantasque, Zaï zaï zaï zaï provoque l’hilarité.
Fabrice (Jean-Paul Roove), acteur de comédie, visite un supermarché. Ce n’est qu’une fois en caisse que le distrait réalise l’oublie de sa carte de fidélité. Devant un tel affront, la sécurité arrive. La panique guidant ses gestes, Fabrice s’arme d’un dangereux poireau avant de prendre la fuite. Déjà activement recherché, son visage dans tous les journaux, il ne trouve qu’une échappatoire : se cacher en Lozère, exotique région étrangère, où personne ne pensera le trouver.
Sur une route tranquille passe une Renault Captur orange. Elle roule, tourne au rond-point, atteint le centre commercial, se gare. Autour d’elle, d’autres Renault Captur oranges, par dizaines, par centaines. Une vision décalée, avant-coureur d’un long métrage excentrique ; et qu’il est jubilatoire de se perdre dans l’univers si particulier de Fabcaro. Le minutieux travail d’adaptation de François Desagnat, rejoint au scénario par Jean-Luc Gaget, aurait pu connaitre traitement semblable dans une ébauche Kafkaïenne de l’œuvre de Samuel Beckett ré-imaginé par les Nuls : un morceau de cinéma impeccable, aux parfums d’absurde, en passe de devenir culte.
Initialement roman graphique, la réalisation se devait de forger une identité visuelle bien définie. Sous le regard scrupuleux de Cyril Houplain, directeur artistique, les détails s’accordent dans la construction d'un environnement très particulier. La mise en abyme originale est modifiée. Elle abandonne le monde de la bande dessinée pour celui du cinéma, transformant le protagoniste en acteur de comédie.
Le jeu, tout en premier degré, est source même d’hilarité. Jean-Paul Roove monologuant devant un parterre d’animaux sur le sens de la vie peut paraitre aussi désopilant qu’un essai sur la nature humaine de ce cher Rousseau, mais devient cocasse par ses intonations délicieusement sérieuses, à contre-courant. Car ce burlesque pertinent, cette agréable hystérie, ne réussit à tenir la route que grâce à la sincérité décalée de sa distribution. Peut-être est-ce pour cette raison même qu’une Yolande Moreau emperruquée peine à convaincre, son rôle de «dernière commissaire à la retraite encore en activité» trop caricatural pour le ton du film.
Précédemment adapté à la radio et au théâtre, Zaï zaï zaï zaï se devait de trouver sa place sur le grand écran. Un comique de répétition affûté, des dialogues surréalistes jouissifs, le long métrage farfelu et insensé de François Desagnat ne sera pas pour tous les goûts, mais trouvera avec certitude son public. Car, si certaines plaisanteries feront rouler les yeux, une grande majorité promet de resurgir inopinément dans nos esprits des heures, des jours, voire des semaines suivant le visionnage. Alors, si vous observez un flâneur, au détour d’une rue, secoué d’un éclat de rire solitaire, peut-être subit-il, tout simplement, l'effet d’une désopilante réminiscence de Zaï zaï zaï zaï.
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Commentaires
“Le complexe du poireau”
Lorsque Fabrice réalise qu’il a oublié sa carte de fidélité dans son autre pantalon, il est déjà trop tard. L’hôtesse de caisse a appelé l’agent de sécurité qui lui demande fermement de le suivre. Paniqué, le client fautif s’empare d’un poireau menaçant, avant de s’échapper. Il devient ainsi le fugitif le plus recherché de France.
Bienvenue en Absurdie ! Un monde qui marche sur la tête. Les voitures sont toutes les mêmes. Les futurs vacanciers jouent la vie des auto-stoppeurs à pile ou face et éjectent ceux qui ne veulent pas chanter. Les maris absents sont remplacés par des acteurs. On s’accouple devant ses invités. Mais que fait la police ? Elle brille par son inefficacité. Quant au verdict final, il demeure inaudible. Libre à chacun de juger.
Évitant toute grossièreté, le film prend un malin plaisir à lancer des piques contre les forces de l’ordre aux bras cassés, les médias manipulateurs, les intellectuels élitistes, les bobos nymphomanes, le racisme ordinaire et les complotistes antisémites. C’est amusant, parfois subtil, mais pas aussi drôle qu’attendu. Entre deux saynètes, le soufflet peut retomber. Et cette ambiance jaunie, anachronique, ne crée pas forcément l’adhésion. Sur le papier et sous la plume caustique du bédéiste Fabcaro, ce comique de situation paraît plus efficace impliquant davantage qu’au cinéma le propre ton et l’imaginaire du lecteur.
(6/10)… Voir plus
Dernière modification il y a 2 ans
Autant le dire tout de suite ce film adapté d'une BD que je n'ai jamais lue, est un petit bijou de cinéma dans le style décalé voir déjanté. L'humour y est présent en permanence, mais il faut juste l'accepter tel qui l'a été écrit sans se poser 1001 questions... En le regardant on. fait très vite le rapprochement avec ce que nous venons de vivre depuis 2020 et forcément j'ai pensé à cette banque de données mondiale qui tôt ou tard contrôlera totalement nos vies. Dès les premières images on comprend ce parallèle et l'on voit bien ce qui nous attend. J-P Rouge qui a oublié sa carte client magasin est excellent et convaincant. Julie Depardieu parfaite, Ramzy. dans un rôle de comédien qui s'investit avant de jouer un personnage est totalement à l'aise et génial. Tout y est dans ce film et maintenant il n'y a plus qu'à espérer que le chemin du contrôle de nos vies soit jonché d'embuches. (G-03.03.22 / 06.03.22)… Voir plus
Dernière modification il y a 2 ans
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