The Happiest Man in the World Belgique, Bosnie Herzégovine, Croatie, Danemark, Macédonie, Slovénie 2022 – 95min.

Critique du film

Le bonheur n’est qu’une façade

Emma Raposo
Critique du film: Emma Raposo

Quatre ans après le très bon God exists, her name is Petrunya, la réalisatrice macédonienne Teona Strugar Mitevska revient avec un 6ème long-métrage qui explore le douloureux passé de la ville de Sarajevo, et de ses habitants encore hantés par la guerre.

Il fait beau à Sarajevo en cette journée placée sous le signe des rencontres, et peut-être de l’amour. Asja (Jelena Kordic Kuret), juriste célibataire de 45 ans, ne se doute pas que l’atelier de speed dating auquel elle s’est inscrite est sur le point de prendre une tournure inattendue. Là-bas, elle fait la rencontre de Zoran (Adnan Omerovic), grand émacié de 46 ans. Comme le veut l’organisation de la journée, les participants commencent par répondre à des questions très banales. Mais plus les questions se précisent, plus la tension montent entre Zoran et Asja. Zoran est en réalité venu à cette journée dans un tout autre but, ce qui aura pour effet de mettre à mal le déroulement de l’atelier.

Présenté au Festival du film de Toronto en 2022, et vainqueur dans la catégorie « Horizons » à la Mostra de Venise en 2022 également, «The Happiest Man in the World» prend ses quartiers entre les quatre murs d’une salle de conférence d’un hôtel converti en lieu de séduction le temps d’une journée. Là, jeunes et moins jeunes apprennent à se connaître, et les générations qui ont vécu la guerre côtoient celles qui n’étaient pas encore nées en ce temps-là. Le passé, le présent et l’avenir dans un même lieu. Visibles ou imperceptibles, les stigmates laissés par le siège de la ville par les forces armées serbes dans les années 90 sont bel et bien présents. Les impacts de tirs sur les façades des bâtiments en témoignent, tout comme d’autres blessures plus discrètes. Le scénario de Teona Strugar Mitevska et Elma Tataragic questionne la vie après un épisode de vie violent: vivons ou survivons-nous après une guerre? Le bonheur est-il seulement possible après ça? Et le pardon?

«The Happiest Man in the World» est un huis-clos intense et brut de décoffrage dans lequel Teona Strugar Mitevska raconte la douleur à coups de gros plans. Les visages des deux personnages (merveilleusement interprétés par Jelena Kordic Kuret et Adnan Omerovic) que la réalisatrice filme avec pudeur et retenue trahissent les émotions béantes ou enfouies. Une violence latente se dégage du métrage, beaucoup de beauté aussi paradoxalement, ainsi que la nécessité d’un travail de mémoire admirablement exécuté par Teona Strugar Mitevska.

27.03.2023

4

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Commentaires

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novecenti

il y a 1 an

époustouflant ! un film exemplaire et si intelligent que l’on devrait tous aller voir pour comprendre ce que la guerre fait aux humains. Bien plus parlant et touchant que tous les films de guerre. Tellement humain et touchant :-)


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