Subtraction Iran 2022 – 107min.
Critique du film
Le double visage de l’Iran
Si le thème du Doppelgänger n'est pas franchement nouveau, le réalisateur iranien Mani Haghighi parvient à lui donner une forme passionnante. Oscillant entre le drame conjugal et le thriller noir, «Subtraction» crée un vertige étonnant sur fond de critique sociale.
Farzaneh (Taraneh Alidoosti), une monitrice d'auto-école enceinte, est très étonnée lorsque, pensant suivre son mari, elle se retrouve devant une maison inconnue. Elle pense que son mari la trompe, or Jalal (Navid Mohammadzadeh) affirme qu'il était ailleurs ce jour-là. Peu de temps après, son époux mène sa propre enquête et rencontre Bita, une personne qui ressemble comme deux gouttes d’eau à sa femme. Plus fou encore, Mohsen, le mari de Bita, pourrait être le frère jumeau de Jalal.
De cette entame mystérieuse, Mani Haghighi, accompagné au scénario du dramaturge Amir Reza Koohestani, développe un film sur les questions d'identité, de genres et la quête de plénitude personnelle dans un régime autoritaire. Dès les prémisses de cette histoire, les partitions de Ramin Kousha font naître les premiers frissons. Mais que se passe-t-il ici ? Et à quoi cela peut-il bien mener lorsque les vies de deux couples s'entremêlent ?
«Dans une société comme l’Iran, il est inévitable de parler de politique dans un film, la question est de savoir comment le faire de manière élégante et intégrée au récit» confie le cinéaste. Ainsi, «Subtraction» parle de la nécessité d’une double vie pour contourner les lois du régime. Ce qui fascine, c'est la manière dont le cinéaste illustre son intrigue. Mani Haghighi, privilégie en effet le réalisme dans sa mise en scène, évitant une symbolique trop évocatrice comme dans, par exemple, «Enemy», thriller de Denis Villeneuve qui reprenait la thématique du sosie. Plongé dans une ambiance obscure et hypnotique, trempé d'une pluie diluvienne et apocalyptique à la «Seven» de David Fincher, «Subtraction» s’adressera à un public friand d’énigmes flottantes et de mystères irrésolus.
(Adapté de l’allemand par Théo Metais)
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Commentaires
“Double impact”
En pleine leçon de conduite, Farzaneh aperçoit son mari monter dans un bus, alors qu’il devrait être ailleurs. Interloquée, la monitrice d’auto-école enceinte décide de le suivre discrètement. Depuis la rue, elle le découvre à la fenêtre d’un appartement en train de converser avec une autre. Et si elle se trompait.
Miroir, miroir, dis-moi qui sont ces reflets qui me regardent ! En effet, Farzaneh et son époux Jalal découvrent leurs sosies Bita et Mohsen, mariés ensemble. De cette mise en place intrigante, naît le vertige. Est-ce un rêve, un cauchemar où la réalité ? Sommes-nous jumelles et jumeaux ? Est-ce le couple que nous avons été ou celui que nous aurions pu être ? Serait-ce l’enfant que nous aurions dû avoir ? Pourrais-je aimer à nouveau cet homme qu’il n’est plus ? Après le choc, le secret et les mensonges, un jeu dangereux de séduction prend place. Le simple joint d’un chauffage symbolise l’anneau d’une nouvelle alliance. Mais au lieu de se contenter du trouble, la réalisation maîtrisée de Mani Haghighi, bien aidé par ses deux comédiens, choisit le thriller, engendrant de froides sueurs. Qui mettra la main sur la double commande ? Et à quel prix ? Entre deux coupures de courant, l’immeuble des uns inquiète quand celui des autres fuit. Le nœud gordien de plus en plus serré devient inextricable. L’issue n’est plus que fatale. Le ciel gronde et sous une pluie battante Téhéran se noie dans la violence.
(7/10)… Voir plus
Dernière modification il y a 1 an
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