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Para no olvidar France, Suisse, Ouganda, Uruguay 2023 – 62min.

Critique du film

Un film documentaire pour garder intact le souvenir d’un père

Emma Raposo
Critique du film: Emma Raposo

La réalisatrice genevoise d’origine uruguayenne Laura Gabay fait revivre dans son premier long-métrage documentaire des archives vidéo et audio de son défunt père afin de retracer le passé de ce dernier émigré en Suisse après le coup d’état de 1973 en Uruguay.

À la suite du décès de son père José, Laura Gabay tombe sur des films Super 8 qu’elle n’avait jamais vus auparavant. On peut y voir son père, sa mère, des vacances au bord de l’eau ou sur un voilier, Genève ou encore les plages uruguayennes. Ces images d’archives, assorties de cassettes audio que son père, sa tante Beky et ses grands-parents se sont échangés durant 30 ans, sont le point de départ d’une réflexion pour la réalisatrice: pourquoi personne n’a jamais parlé de l’exil de son père, ou encore de l’exil de sa mère qui a fui l’Espagne de Franco, ni même de l’exil de ses grands-parents turcs et juifs séfarades vers l’Uruguay? Et la réalisatrice de s’interroger: pourquoi n’a-t-elle jamais posé de questions?

Présenté au Festival Vision du Réel en 2023, Para No Olvidar (Pour ne pas oublier) mélange images d’archives muettes filmées en Super 8 avec des fichiers sonores. En voix off, Laura Gabay, scénariste et réalisatrice du documentaire, tente à travers ces images et ces enregistrements audio, de garder le souvenir de son père intact, de faire parler le passé et de questionner le silence qui a entouré l’exil politique de son père. Un silence à combler, l’histoire à retracer et à réinventer d’une famille qui a vécu plus longtemps séparée que réunie. Dès lors, comment garder le lien malgré la distance?

Laura Gabay créée une fresque intimiste de sa famille, une sorte de capsule temporelle dans laquelle le temps est suspendu, tirant parfois un peu trop en longueur. La joie de vivre des images Super 8 cohabite avec une réalité plus cinglante. Derrière la douceur des journées à la plage, baignées de soleil, se dessine l’histoire d’une famille dispersée à travers le globe, souffrant de maux silencieux: l’exil et le déracinement.

Laura Gabay parle de son film comme d’un collage, dont les textes ont été écrits en même temps que le montage des images et du son. Un puzzle à reconstituer fait de voix grésillantes et d’images aux couleurs passés prises sur le vif. Au milieu, le tango berce la narration du récit d’un père et de toute une famille. Para No Olvidar, témoin des différences nord-sud, est tout à la fois un travail de mémoire, d’héritage et de transmission, de déracinement mais aussi de questionnement. Et de nous interroger: Laura Gabay a-t-elle finalement trouvé les réponses à ses questions?

20.03.2024

3.5

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