Une nuit Belgique, France 2023 – 91min.

Critique du film

Les déambulations nocturnes d’un couple éphémère

Théo Metais
Critique du film: Théo Metais

Quatrième film d’Alex Lutz, «Une Nuit» fait se rencontrer deux amants anonymes. Une romance légère et habitée par ses deux acteurs.

Deux anonymes se bousculent dans une rame de métro à Paris. Bientôt les engueulades d’usage laisseront place à une altercation plus romantique. Tout les oppose et pourtant : le temps d’une nuit, Nathalie (Karin Viard) et Aymerick (Alex Lutz) flâneront ensemble, innocemment, à l’abri des regards d’un Paris endormi. Ils ont des familles, et pourtant, cette nuit aura des airs de récit initiatique pour ces deux êtres vagabonds.

À Paris, on s’aime et s’égrène à la vitesse d’un Uber. Des romances au grand cœur qui se dissipent dans les gorges de Châtelet-Les Halles, «emportées par la foule» comme disait la chanson. Des vies pétulantes dont s’émancipe ici le nouveau film d’Alex Lutz. Après «Guy» en 2018, Alex Lutz et Karin Viard (tous deux scénaristes) proposent une nuit de l’épure pour vagabonder et faire l’école buissonnière. Sur leur chemin : un photomaton, une soirée volée, une lecture de Marivaux, un restaurant asiatique, un club échangiste, un cirque. Le temps d’un aparté, deux anonymes s’autorisent à vivre en marge d’eux-mêmes et de leurs familles. Et l’aube de rendre son verdict.

Dans les décors de la capitale française, et évitant les écueils de la carte postale, Alex Lutz s’accompagne d’une modeste réalisation et rebat gentiment les cartes de la romance éclair. Rien de nouveau sous la lune, quelque part entre «Les Amants du Pont-Neuf» de Leos Carax et la célèbre émission «Paris Dernière», «Une Nuit» propose une expérience du couple circonscrite à ce duo, mais n’en reste pas moins touchante. Une mise en scène économe, une photographie intime (Éponine Momenceau) ; la ville s’efface en arrière-plan et permet à Karin Viard et Alex Lutz d’y vaguer admirablement. Au milieu de leurs versifications sur l’existence, le spleen manquera d’onirisme et d’un souffle plus large avant que le rideau ne vous cueille en clôture. Aussi épurée soit la réalisation, «Une Nuit» déborde de l’amour que les acteurs portent à leur personnage.

03.07.2023

3.5

Votre note

Commentaires

Vous devez vous identifier pour déposer vos commentaires.

Login & Enregistrement

CineFiliK

il y a 1 an

“Drôle d’endroit pour une rencontre”

D’abord hésitante, elle s’immisce brusquement dans le métro bondé et le bouscule. Énervé, il lui demande de s’excuser, ce qu’elle fait du bout des lèvres. La dispute se poursuit, indiscrète, exagérée. Les regards gênés ou amusés se posent sur ce drôle de duo qui, une fois sorti de la rame, fait l’amour dans un photomaton. Ils auront toute la nuit pour se connaître.

Le procédé fait immédiatement penser à Before sunrise de Richard Linklater qui avait si bien su capter en temps réel, dans un flux continu de paroles, la rencontre séduisante entre deux inconnus avant qu’ils ne se séparent avec le soleil. En France, on s’engueule et on baise, puis l’on épilogue. En discourant de tout et de rien, voire de l’essentiel : l’alchimie, la disponibilité émotionnelle, le mariage, les premières fois… C’est parfois juste, bateau aussi, bavard. Cheveux hirsutes, sueur perlante, vêtements informes, Aymeric et Nathalie ne sont pas là pour plaire : « Vous puez », lui assènera-t-il. Troquer leurs pulls et chemises contre des habits adolescents les dénote encore plus. Dans une fête ou une boîte échangiste, ce couple mal assorti tranche. Eux-mêmes le reconnaissent en se définissant comme un rongeur qui se taperait un clebs. Comparée aux ruelles de Vienne, la nuit parisienne, suspecte, manque également de romantisme. Certes, le secret de l’intrigue, que l’on devine assez vite, change le contexte et décale le parallèle avec le film de Linklater. Il explique l’absence d’afféterie des personnages et le côté forcé de la situation. Comment se dire adieu devient une question urgente. Dans nos souvenirs de jeunesse, Céline et Jesse nous avaient conquis en trouvant une autre réponse. Derrière et devant la caméra, Alex Lutz, secondé dans le jeu et l’écriture par sa grande amie Karine Viard, manque de naturel dans son approche. Il avait pourtant si bien su nous convaincre avec son hommage très premier degré à Guy, chanteur de charme qui n’avait jamais existé.

(6/10)Voir plus

Dernière modification il y a 1 an


Eric2017

il y a 1 an

"Vous savez que nous ne pourrons pas nous revoir hein, vous le savez mon gars ?"
Cette phrase de Karin Viard à Alex Lutz, raisonne encore dans ma tête. J'y suis retourné et connaissant la fin, je l'ai vu sous sous un autre angle. Mais quel bonheur. Une écriture parfaite, un jeu des acteurs sans failles, bref ce sont des films qui me font dire que la vie est plus belle au cinéma... Alors, si un tant soit peu on arrive à vivre ses émotions alors allez voir ce chef d'oeuvre d'Alex Lutz. (G-16.07.23)Voir plus


Eric2017

il y a 1 an

Magnifique ! Sans aucun doute pour moi, c'est le meilleur film d'Alex Lutz. Tout y est! Des excellents dialogues, des gros plans jamais intrusifs, et des vues d'un Paris que l'on a plus du tout l'habitude voir au cinéma. Alex Lutz ayant écrit le scénario en pensant en permanence à Karin Viard, et ça se sent car ce tandem fonctionne merveilleusement bien. C'est vraiment un chef d'oeuvre! (G-10.07.23)Voir plus


Autres critiques de films

Gladiator II

Red One

Venom: The Last Dance

Emilia Pérez