Agent of Happiness Bhoutan, République Tchèque, Hongrie, Etats-Unis 2024 – 93min.
Critique du film
À la recherche du bonheur
Présenté en première mondiale à Sundance en janvier dernier, «Agent of Happiness» d’Arun Bhattarai et Dorottya Zurbó débarque à Zurich pour la 20e édition du ZFF. L’œuvre, en compétition pour l’œil d’or du meilleur documentaire, séduit par sa photographie, son découpage et son intrigante thématique.
Amber Kumar Gurung est un agent du bonheur. Employés par le gouvernement, lui et son collègue Guna Raj Kuikel traversent les paysages montagneux du Bhoutan et questionnent les habitant·es afin d’analyser le niveau de satisfaction de la population. Mais comment se définit le bonheur?
L’Himalaya Bhoutanais: ses espaces grandioses, magnifiés par la caméra d’Arun Bhattarai et Dorottya Zurbó, suffisent à séduire le public. Déjà en 2017, le duo hongro-bhoutanais les mettait en scène dans leur tout premier long métrage documentaire «The Next Guardian». Sept ans plus tard, Arun Bhattarai endosse une nouvelle fois le rôle de directeur de la photographie pour nous offrir un voyage éblouissant et passionnant dans son pays natal et sa philosophie.
Typique du Bhoutan, le “Bonheur national brut” est pour la première fois préconisé par le roi dans les années 1970. Inscrit dans la constitution, il a pour but d’adapter le développement du pays en respectant les valeurs spirituelles bouddhistes. À l’aide d’un questionnaire, les agents du bonheur déterminent, sur une échelle de un à dix, le niveau de bonheur de chacun·e. Le processus est intrigant et se base aussi bien sur des éléments matériels que spirituels.
Construit admirablement, le documentaire se regarde comme une œuvre de fiction. La naissance d’un veau, le calme de la campagne, la religion: les raisons d’être heureux sont multiples. Mais la mélancolie envahit le cœur de certain·es. Une femme trans, un homme veuf ou encore trois femmes mariées à un même homme: à vif, les interrogé·es partagent leurs tristesses, leurs regrets, leurs interrogations. Et de ces récits, si personnels, émanent une émotion universelle.
Au premier plan, l’agent du bonheur Amber captive par son aura solaire. Petit à petit, il se dévoile lui aussi. D’origine népalaise, il s’est vu retirer la nationalité bhoutanaise lors des nettoyages ethniques des années 90. Sans carte d’identité, il peine à trouver un emploi fixe ou même une relation. En toute simplicité, «Agent of Happiness» expose son histoire, celle de millier de personnes dans son pays. Tour à tour dramatique, drôle et touchant, le documentaire met à nu les émotions propres au genre humain. Une expérience à ne pas rater.
(ZFF 2024)
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