Sasquatch Sunset Etats-Unis 2024 – 89min.

Critique du film

De singuliers big foots chez les frères Zellner

Critique du film: Maxime Maynard

Les frères Nathan et David Zellner retrouvent le chemin de la capitale allemande et présentent un film barré, grotesque, écœurant et singulièrement intriguant : «Sasquatch Sunset».

Durant une année, nous suivons une famille de quatre big foots dans une forêt nord-américaine. Leur vie s’écoule au rythme de leurs besoins, mais dans la nature, les dangers sont nombreux.

Les frangins Zellner, Nathan et David, ne font vraiment rien comme tout le monde. Acteurs, réalisateurs, scénaristes, leur nom est souvent synonyme d’un voyage cinématographique hors du commun. Alors qu’ils avaient déjà offert une version très personnelle du genre western en 2018 avec «Damsel», en compétition à la Berlinale, les voilà qui se réapproprient la légende de big foot dans «Sasquatch Sunset», une œuvre particulière et déroutante.

Le big foot, c’est cet être anthropomorphe, possible chainon manquant entre l’humanité contemporaine et ses ancêtres préhistoriques, qui serait originaire des régions forestières du nord du continent américain. Pour leur long métrage, Nathan et David Zellner présentent une famille entière de ces hominidés légendaires à l’instinct bestial. Manger, dormir, se reproduire, marquer leur territoire : exposé sans détours à l’écran, leur quotidien engendre quelques scènes peu ragoûtantes à base de fluides corporels. Entre rires gênés et véritable répulsion, notre cœur balance. Comme pour compenser l’humour enfantin et crasseux, la magnifique photographie de Mike Gioulakis éblouit.

Caché sous leurs maquillages et costumes simiens - réalisés sous la direction de Steve Newburn- la distribution est méconnaissable. Si Nathan Zellner, lui-même, Christophe Zajac-Denek et Jesse Eisenberg se prennent au jeu, c’est surtout Riley Keough, petite-fille d’Elvis Presley, qui se démarque par une aura magnétique bien utile devant le manque de vocabulaire des quatre créatures. En effet, afin de communiquer, elles crient, grognent, hurlent, piaillent pour une heure trente de conversations onomatopéiques fastidieuses. L’histoire, à supposer qu’il y en ait vraiment une, est alors contée à travers des gestes et des expressions exacerbés. Et si les sentiments exposés restent parfois compliqués à identifier, la musique, composée spécialement par le groupe de musique expérimentale The Octopus Project, aide à les illustrer.

Soyons honnêtes, «Sasquatch Sunset» sera bien loin de faire l’unanimité. Déconcertés, nous nous laissons valdinguer entre la beauté du paysage et la simplicité ridicule du contenu. Pourtant, une véritable curiosité éclot une fois le film achevé. Et peut-être est-ce là le dessein même du long métrage ? Choquer, marquer et surprendre son public, afin qu’il s’exclame haut et fort : «Mais qu’est-ce que je viens de regarder ?»

(Berlinale 2024)

28.02.2024

2.5

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