Gloria Bell Chili, Etats-Unis 2018 – 102min.

Critique du film

Un portrait électrisant

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Sebastian Lelio fait partie des grands cinéastes du moment. Avec sa réadaptation américaine de Gloria, sorti en 2013, il prouve une nouvelle fois qu’il est pétri de talent, bien aidé par une Julianne Moore sublime.

Gloria Bell. Une agent d’assurance divorcée, peu rancunière, prête à embrasser une seconde vie, prête à revivre l’amour qu’elle a connu. Elle écume les différents dancings de Los Angeles, elle s’attaque tous les soirs à un nouveau morceau, jusqu’à sa rencontre avec Arnold, un ancien militaire, dorénavant à la tête d’une exploitation d’armes destinées au paintball, et lui aussi fraîchement divorcé. Un premier temps, la passion est à son comble, avant de gentiment s’éteindre. Gloria se découvre sous un autre jour, dans la peau d’une femme libre.

Le grand Sebastian Lelio offre un rôle somptueux à Julianne Moore. En reprenant son oeuvre initiale, Gloria, Lelio développe une romance pas comme les autres, loin des carcans habituels de l’amour, pour n’en ressortir que la sève, la potion magique qui dessine les contours d’une femme prête à vivre sa vie, à la croquer à pleines dents. Une fable féminine subtile, poignante. L’héritage d’un premier mariage, des enfants toujours dans un coin de la tête malgré l’envie de voler de ses propres ailes. Pour nos deux amoureux, Gloria (Julianne Moore) et Arnold (John Turturro), il y a comme un hic, un décalage. Lelio brosse avant tout le portrait d’une femme, et non d’une relation amoureuse, comme l’était son sublime Une Femme Fantastique ou encore le superbe Désobéissance. Sa faculté à penser, à dessiner la femme à travers la complexité psychologique touche au sublime. Il y a toujours une richesse, une palette d’émotions fascinantes, travaillées pour en délivrer un portrait intelligent.

On retient ce segment se déroulant à Las Vegas comme le point d’orgue d’un film : une femme, plus elle s’entiche d’un homme, se vautre dans le chagrin, dans une vie qui ne l’amène nulle part. Des joies éphémères, une tristesse toujours plus lourde. Peut-être que son erreur était de recroiser l’amour, alors que la solitude lui amène d’autres satisfactions. Elle s’enivre de l’émancipation, l’étreint, pour remplacer la mélancolie par une joie intérieure dévorante. L’image est forte, puissante dans sa forme et son fond. L’émancipation passe par un exorcisme du passé, un besoin de se détacher des tracas. Julianne Moore incarne cette course, cette lutte effrénée, à retrouver une fraîcheur à l’image du titre entêtant Gloria d’Umberto Tozzi. Un reflet saisissant d’une femme qui s’affranchit des hommes.

En bref !

Gloria Bell trouve une belle dynamique, grâce à une Julianne Moore magnifique, en compagne délaissée, puis en femme forte. Lumineuse, magnétique, authentique que la performance de l’actrice oscarisée. Gloria Bell est ce saut dans l’inconnu, celui d’une femme prête à refaire sa vie, mais toute seule, sans l’aide de personne, héroïne de sa propre vie. Elle est belle Gloria Bell.



29.04.2019

4

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Commentaires

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Casper73

il y a 5 ans

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Tableau d’une femme affichant une belle cinquantaine d’années. Évaporée, la bien nommée Grace Bell s’étourdit pour échapper au poids des ans. À la croisée de sa route, Arnold, un ancien militaire à la stratégie amoureuse érodée. Je t’aime, certainement toi aussi, je me fais (r)accompagner, je t’ignore, je te quitte, je refuse tes appels mais j’écoute la sonnerie comme autant d’hommages déposés aux pieds de mon amour-propre. Pffff. Les 30 dernières minutes oxygènent sans pour autant ranimer le feu et ce, malgré le bon jeu de Julianne Moore qui semble très fière de ses courbes ( à juste titre).
Quoique contondantes, quelques facettes bien éclairées de cette période transitoire interpellent sans pour autant nous éviter de bayer aux corneilles en attendant la fin.Voir plus

Dernière modification il y a 5 ans


Eric2017

il y a 5 ans

Une histoire de notre époque magnifiquement racontée. L'ambiance qui y règne, l'émotion, la sensibilité font que l'atmosphère de ce film est totalement réussie. Julianne Moore est omniprésente et rayonnante ce qui donne le ton exact à ce film. Quant à John Turturro il est parfait. J'ai beaucoup aimé. (G-11.05.19)Voir plus


vincenzobino

il y a 5 ans

4.5: Le club des ex
Gloria, la cinquantaine, semble rayonnante de bonheur: un travail solide, un premier petit-enfant sur le point de naître et une apparente excellente relation avec ses enfants. Il lui manque cependant une compagnie, une épaule sur laquelle s’appuyer. Effectivement divorcée de Peter, ce dernier ayant perdu le lien familial se trouve mis devant le fait accompli de cette grossesse. C’est alors qu’Arnold, directeur d’un centre de loisirs entre dans sa vie. Avec ses secrets et ses doutes. Comment entreprendre une relation durable et solide? Quel bilan de vie tirer du demi-siècle d’existence avec ses peines et certaines joies? Telles sont les thèmes de cette thérapie, brillante et contagieuse.
Le premier plan sur Gloria jette un premier froid: un bar, une rencontre coup de foudre, une première nuit: elle semble appartenir au club des femmes fatales. Et pourtant n’en a absolument rien en commun. L’apparent alter-ego en Arnold, véritable homme invisible, va forger sa thérapie de la dépendance.
Il se dégage tout du long un regard sceptique sur cette relation : la peinture s’avère omniprésente tant par l’activité de Arnold que par une géniale séquence rebelle. Mais c’est bien Queen Julianne qui impressionne: l’on vit le film avec elle, éprouvant ses remords et partageant ses peines. Cette relation improbable et mouvementée, l’actrice semble l’avoir connue tant son regard lors du passage aux actes nous marque.
Et Lelio, en parfait psychologue, nous emporte dans sa consultation jusqu’à cette géniale réécriture musicale finale constituant le parfait remède à sa thérapie. Et l’air vous restera en tête.
A noter l’apparition furtive de Sam Gamgie en véritable tombeur d’un soir et seigneur de l’anneau amoureux magique.
A recommander vivement...Voir plus


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