Marie Madeleine Royaume-Uni 2017 – 120min.

Critique du film

Mary Magdalene

Théo Metais
Critique du film: Théo Metais

Au premier siècle en Terre Sainte, Marie Madeleine fuit le patriarca des hommes et rattrape le cortège d’une curieuse procession. Suivant les enseignements d’un certain Jésus de Nazareth, le cortège se rend à Jérusalem, et la jeune femme se retrouve aux fondements du Christianisme.

Demi-mondaine, disciple, compagne spirituelle ou véritable épouse; en 2016, après des siècles d’histoire et autant de légendes éventées, le Vatican reconnaît Marie Madeleine comme étant l’apôtre des apôtres, leur égal et la première à avoir répandu la nouvelle de la résurrection de Jésus. Pour son deuxième long-métrage, Garth Davis retrouve Rooney Mara (Marie Madeleine), accueille Joaquin Phoenix (Jésus de Nazareth) et des seconds rôles francophones (Tahar Rahim, Denis Ménochet & Tchéky Karyo) pour une douce épopée biblique.

Sans aucun prosélytisme, ni doté d’un tempérament pamphlétaire et émancipé de la véracité documentaire, le réalisateur australien compose une large fresque sur l’émulsion spirituelle aux fondements du Christianisme. La figure de Marie Madeleine donne une dimension très contemporaine au récit et lorsque la jeune femme récuse la gérontocratie des hommes, le parallélisme avec notre temps est inratable. Originalité drastique? Non, mais une fraîcheur s’en dégage.

Le randonneur de Nazareth avait donc une muse, une lady, spirituelle du moins, et elle illumine cette genèse sous les traits de Rooney Mara. Fusionnelle et platonique, leur relation est emprise de minimalisme, presque dépassionnée. Le calme règne chez Davis, lui l’ancien des arts plastiques, épure et colore de lin la passion du Christ. Très axé sur les silences et la lenteur, le réalisateur profite des vertus épiques du mélo mais procure à l'exode une émotion nouvelle et trouve une forme de justesse lors du porter de croix.

Perturbé par la mise en pratique du message biblique, le personnage de Pierre, magistralement intériorisé par Chiwetel Ejiofor, marqué par sa dualité avec Marie, jalonne ce microcosme chrétien d’une castagne platonicienne. Passionnante elle-aussi, la réécriture de Judas Iscariote (Tahar Rahim). Lui le traître biblique et heureux propriétaire d’un blâme éternel, retrouve une noblesse dans la culpabilité. Il y aura cette scène: Jésus rédempteur et Judas agenouillé, aux portes d’une honte impérissable, puis une confidence, déchirante.

Il fallait au moins le magnétisme de Joaquin Phoenix et des acteurs de sa trempe pour porter à l’écran l’évangile de Marie. Jouissant d’une relecture plus contemporaine, l’histoire chancelle néanmoins de quelques inégalités. Tous les apôtres se meuvent d’une vision plus acerbe, jusqu’à Jésus qui par à-coups prend des airs de gourou sanskrit douteux. Seule rescapée, Marie et son parcours bienveillant. Mais après Pasolini, Scorsese, ou Gibson, Davis offre un spectacle humaniste, lénifiant, délicat et ficelé avec maîtrise.

22.03.2024

3

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Commentaires

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Casper73

il y a 6 ans

Agapé
Esprit libre, Marie Madeleine est mise en lumière en tant que nouvelle femme debout sur le chemin qu'elle a choisi de suivre. L'époque ne lui laissait que la voie de mariage et maternité. Dépossédée de ses aspirations, elle en appelle à sa Foi. Après un baptême par immersion, elle sera un apôtre du Christ.
Rooney Mara, prête ses doux traits à une femme que les hommes de ce millenium ont décriée et dévoilée comme objet d'opprobre. Le réalisateur Garth Davis nous offre une vision d'une apôtre éclairant la parité du message du Lion de Juda. C'est au rythme d'un cheminement au pas propice à la réflexion qu'il retrace le temps des Pâques du Messie. Dans ce rôle, qui aurait pu être sans visage, Joaquin Phoenix interprète un Christ usé, aux yeux bleus, fatigué souvent à la limite de l'étourdissement. Certes les écritures nous offre la description de symptômes physiques d'angoisse, cependant un fils d'un charpentier âgé devait être un homme ayant aidé son père; robuste, aux mains calleuses, la peau burinée et au physique d'un homme de Palestine. L'acteur Tahar Ramin dans le rôle de Judas aurait mieux convenu. Subsiste la portée du message d'une éventuelle trinité spirituelle terrestre : Christ, Pierre, Marie.Voir plus

Dernière modification il y a 6 ans


vincenzobino

il y a 6 ans

2.5: La force de l'eau
L'an 33: Marie-Madeleine vit le long du Jourdain. Forcée de se marier, la venue du prophète de Nazareth va lui ouvrir une nouvelle voie. Encore faut-il être acceptée par ses apôtres, en particulier Pierre très sceptique face à cette apparente possédée.
En cette période pascale, sortir un film sur Marie-Madeleine, longtemps décriée avant d'être rétablie tout récemment par François, était un pari plutôt osé : il fallait d'une part nous peindre sa relation avec le Messie, et d'autre part innover sur un plan cinématographique en osant une approche féminisée des événements.
Le premier point est assez bien réussi: le premier plan aquatique, fil rouge du rôle de Marie-Madeleine, entraîne une lenteur laissant libre cours à la prière. Ces longueurs sont néanmoins bien présentes jusqu'au but ultime : Jérusalem et si vous n'avez pas l'âme chrétienne, le temps va vous sembler long.
Le second point en revanche nous laisse sur notre faim: l'influence de la jeune fille n'est pas assez mise en lumière et, du coup, les évocations de la Cène et de la Passion sont d'un classicisme redoutable.
Le point me gênant le plus est qu'à aucun moment l'on se croit à Jérusalem, si ce n'est peut-être le Golgotha: le choix de tourner en décors naturels le film ôte cette impression de Messe. Et du coup, malgré un très bon casting (Phœnix sans chichi, Ejiofor et Rooney impeccables), l'hostie a un goût plutôt amer et la communion n'est pas tout à fait au rendez-vous. A vous de voir uniquement si vous avez la Foi...Voir plus


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