Albatros France 2020 – 115min.

Critique du film

La tactique du gendarme

Théo Metais
Critique du film: Théo Metais

Réalisateur en 2005 du film «Le petit lieutenant», voilà que Xavier Beauvois prend par le col l’histoire d’un sous-officier de gendarmerie normand au seuil d’une bavure qui changera sa vie à jamais. Incarné par un solide Jérémie Renier, Albatros n’a pas manqué de cueillir son audience (virtuelle) en compétition à la 71e Berlinale.

Le pittoresque des plages d’Étretat comme décor, Laurent (Jérémie Renier) officie comme sous-officier de la gendarmerie locale. Après 10 ans de vie commune avec Marie (Marie-Julie Maille), un mariage se présage au milieu d’une routine de gendarme faite de bagatelles plus ou moins légères, voguant de l’ivrogne du bistrot du coin, aux suicides, aux soupçons d’inceste, avec en trame de fond l’histoire de Julien (Geoffrey Sery), un éleveur à bout de souffle. Et alors qu’un jour, il refuse de coopérer dans le cadre d’une inspection, Julien prend la fuite. Personne ne pouvait prédire la suite des évènements.

Il avait exploré les tréfonds de la police urbaine dans «Le petit lieutenant», ici Xavier Beauvois fait le pari d’une esthétique proche du réel pour rendre à l’histoire de cet officier militaire en campagne toute sa véracité. «Quand je pense à ma vie, il me semble que je n’y ai fait que changer de costumes» disait Jouvet à Gabin dans «Les Bas-fonds». Laurent est cette figure respectée d’Étretat, enfant du pays, père, époux, petit-fils, voisin, marin, ami, gendarme et bientôt «meurtrier», les costumes s’enchaînent et se déchaînent dans une volte insoutenable. Albatros se fait alors le récit d’une dégringolade à deux vitesses; celle de Julien (impeccable Geoffrey Sery), un éleveur de 35 ans économiquement pris à la gorge, qui s’enfuit avec son fusil à la suite d’un contrôle et Laurent qui essaiera de l’empêcher de commettre l’irréparable.

Comme un présage de la brutalité à venir, l’ouverture et ce corps qui s’écroule sur les galets en pleine séance photo. Un récit déployé en deux parties, une première moitié qui ouvre une lucarne quasi documentaire sur le quotidien de cette gendarmerie, puis un pan assourdissant à la suite du drame. Le belge Jérémie Renier y livre une prestation d’une intériorité de haute voltige, magnifique lorsque les mots lui manquent. Au concours d’excellence, il faudra mentionner la partition impressionnante de Marie-Julie Maille aussi scénariste. Enfin, il suffira à la jeune Madeleine Beauvois, dans le rôle de Poulette, leur fille, de quelques paroles adressées à son père effondré pour briller. Face à l’océan Atlantique, Xavier Beauvois livre une intense fresque naturaliste sur une humanité laissée en friche après un drame.

24.08.2021

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