Indes galantes France 2020 – 108min.

Critique du film

Opéra des rues

Critique du film: Colin Schwab

Philippe Béziat – réalisateur habitué des documentaires musicaux et autres captations de performances scéniques – livre un métrage très abouti sur la genèse d’un opéra tant novateur que nécessaire.

2019, au prestigieux Opéra de Paris, c’est une petite révolution qui se prépare : «Les Indes Galantes», fameux opéra-ballet de Jean-Philippe Rameau, s’apprête à être ré-interprété. Pour ses parties dansées, l’on a choisi de s’adresser à des danseur.euse.s de hip-hop, de krump, de break ou encore de voguing, venu.e.s des quatre coins du globe. La tension dont le documentaire fait acte est alors posée : l’on va lier un mode de représentation blanc, bourgeois et daté du 18ᵉ siècle à des types de danses contemporaines dont la tradition vient des rues. Le film se chargera alors de définir le pourquoi et le comment du projet, tout en montrant les effets que cette œuvre hybride a pu avoir.

Devant Indes Galantes, impossible de le manquer : Philippe Béziat excelle dans la captation des arts scéniques. Multiples de ses plans, cadrant la grandiose mise en scène de l’opéra, caressent et imprègnent la rétine. Or, son film se veut plus qu’une simple captation, il doit pouvoir documenter la genèse de l’œuvre tout en faisant acte des tensions historiques et sociales y prenant place.

Si le documentaire nous réjouit, c’est alors qu’il sait retranscrire le caractère hybride et inconventionnel de cet opéra dans son propos, mais aussi dans sa forme. Car l’on s’y permet plusieurs «impuretés», comme le fait de faire cohabiter des images très «cinématographiques» et travaillées avec des «stories» filmées verticalement au smartphone. Et ce caractère composite existe également dans le montage son : on se permettra notamment de mixer de la musique traditionnelle amérindienne avec les voix de l’opéra.

Par son documentaire, Béziat accomplit un geste crucial : il met en lumière une œuvre qui aura dérangé – avec beaucoup de pertinence – une bonne partie de la critique d’opéra, et renforce sa portée politique, la fait sortir des murs de l’Opéra.



05.09.2022

4.5

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